Messieurs les promoteurs de l’énergie nucléaire,
Avez-vous entendu l’appel au secours international lancé par l’électricien Tepco et par le gouvernement japonais il y a quelques jours ? Cet appel s’adresse à vous, experts nucléaires, pour trouver une solution rapide à l’urgence actuelle.
Quelle est cette urgence, alors que l’arrêt à froid a été déclaré en décembre 2011 ?
Depuis deux ans et demi, nous sommes témoins impuissants de ce qui se passe à Fukushima. 3 cœurs fondus, 3 coriums perdus, 3 enceintes de confinement percées, 3 explosions atmosphériques, 3 piscines de combustible en position instable. A la limite, on aurait encore pu espérer qu’une fois le nuage passé, les coriums refroidis et les piscines vidées de tout combustible, tout était maîtrisé. Mais on est loin d’une stabilisation de la situation. On se retrouve plutôt proche d’un clash.
Peut-être étiez-vous en vacances et n’êtes vous pas au courant des évènements de cet été car je n’ai pas encore vu – excepté sur le site de l’IRSN qui affirme que la situation ne s’aggrave pas – la moindre réaction de votre part après la reconnaissance officielle d’un flux continu de plusieurs centaines de m3 d’eau hautement radioactive se déversant directement dans l’océan Pacifique !
La communauté internationale ne semble pas avoir pris la mesure du problème. Pourtant, un cap irréversible a été franchi : Fukushima, même si on s’en doutait fortement, est devenu officiellement une fabrique internationale de radionucléides dont personne ne maîtrise le mécanisme.
Personnellement, je ne suis pas expert nucléaire, alors que vous, si. C’est donc bien à vous que Tepco s'adresse. Il vous appartient donc de réagir rapidement puisqu’il s’agit d’une urgence nucléaire reconnue par la NRA, l’agence de régulation nucléaire japonaise.
Si on ne trouve pas de solution rapide, le combustible et les produits de fission contenus dans les trois coriums perdus – soit 250 tonnes – vont se déverser en continu durant des dizaines d’années dans l’océan Pacifique. Certes, ils se diluent, mais ils ne disparaissent jamais et entrent dans la chaîne alimentaire mondiale, avec les effets de concentration que vous connaissez.
Vous, promoteurs de l’énergie nucléaire, avez maintenant l’obligation morale de trouver une solution immédiate pour arrêter cette contamination constante. Il est urgent que vous répondiez maintenant au SOS de Tepco, car chaque particule radioactive lâchée dans l’environnement va parcourir la terre durant des centaines d’années, voire des milliers pour certaines, et affecter les êtres vivants.
Personne, depuis deux ans et demi, n’a encore trouvé de solution à la catastrophe nucléaire de Fukushima. Si vous et l’armée d’experts français que vous dirigez – les meilleurs au monde selon vous puisqu’aucun accident nucléaire n’est encore arrivé dans l’Hexagone – n’avez de solution immédiate à fournir au Japon, alors prenez les mesures immédiates pour arrêter le nucléaire en France, car aucune de vos centrales nucléaire n’est plus sûre que celle de Fukushima.
Le plus gros problème est qu’il semble que vous n’ayez pas de solution. On ne vous entend pas. Votre silence cache votre désarroi. Vous vous cachez derrière vos hautes fonctions car vous n’avez pas de solution à apporter contre la pollution continue de la planète.
Soyez responsables, ayez du courage, reconnaissez que la bataille est perdue, afin de sauver ce qui est encore sauvable. Informez les hommes et les femmes politiques sur les conséquences du rayonnement alpha du plutonium dans nos cellules. Faites en sorte qu’ils prennent conscience de l’urgence présente afin qu’ils engagent immédiatement notre société dans une reconversion énergétique. Nous avons besoin de vos dizaines de milliers d’employés pour que le danger atomique reste confiné. Mais nous n’avons plus besoin de cette énergie nucléaire qui nous met en constant danger de maladie et de mort.
L’avenir de l’humanité est encore entre vos mains : s’il vous plait, trouvez une solution immédiate à l’urgence de Fukushima, ou arrêtez immédiatement le nucléaire.
Si cela est trop difficile pour vous, alors s’il vous plait, démissionnez de vos postes de responsabilité car, dans ce cas, vous n’êtes plus en mesure de protéger vos concitoyens.
Pierre Fetet
Edit du 7/09/13 :
Un lecteur m'a fait remarquer que le patron du CEA n'est pas Yves Bréchet, mais Bernard Bigot. J'ai donc changé le titre en conséquence. Yves Bréchet est Haut-commissaire à l'énergie atomique, c'est à dire conseiller du CEA, du gouvernement, etc...d'un point de vue scientifique. Mais comme il est expert en nucléaire, je pense que l'appel de Tepco s'adresse également à lui.
L’homme est sans défense face à la radioactivité. Aucun de ses sens n’est en mesure de la percevoir. Il ne ressent pas la radioactivité qu’il subit. La radioactivité n’éveille en nous aucune alerte. La radioactivité se joue de notre instinct de conservation. Bien qu’on en meure, aucune douleur d’aucune sorte ne nous avertit de l’agression ponctuelle soufferte, nous invite à nous éloigner des lieux.