28 mai 2012 1 28 /05 /mai /2012 22:50

fukushima_seb_jarnot_statement_english.jpg« Nous avons besoin de la musique, de la poésie et de l’art qui pourraient nous montrer un point de vue possible ainsi qu’une façon dont on aborde la réalité. »

 

 

 

Peu de temps après la catastrophe de Fukushima, un collectif d’artistes japonais s’est réuni autour de la figure de Otomo Yoshihide, originaire de cette ville, pour tenter de remettre de la vie là où il n’y avait plus que poison et angoisse. Un projet est rapidement né, Project Fukushima!, véritable appel à la création qui a donné lieu à un festival, situé à Fukushima même, et à une série d’événements à travers le monde (Londres, New York, Bangkok, Séoul, Singapore, Paris…).

 

A la suite de ce festival, webSYNradio a souhaité rester à la disposition du projet Fukushima! et continuer à « agir » avec un nouveau projet pour 2012 : « Et pendant ce temps là, à Fukushima…» (Meanwhile, in Fukushima…)


Pour réaliser ce nouveau projet,  Dominique Balaÿ s’est rendu à Fukushima du 15 au 30 mai 2012 pour enregistrer les sons de la vie « normale » et accompagner les différentes initiatives lancées par le collectif Fukushima! en vue de faire vivre leur engagement et leur manifeste, notamment à travers l’organisation du prochain festival qui aura lieu durant l’été 2012.


Avec les sons collectés et organisés en bibliothèque « open sounds », une invitation a été lancée à des artistes pour se confronter à cette matière et cette thématique, et tenter, à travers les œuvres créées, de jeter une ligne de vie entre là-bas et ici.


Avec ce projet de création sonore, il s’agit pour Dominique Balaÿ de rester fidèle au sens singulier indiqué par Otomo Yosihide, Michiro Endo et Ryoichi Wago dans leur manifeste : ni dénonciation militante, ni simple rapport des faits, plutôt la démonstration d’un désir et une tentative de maintenir une « connexion » avec ces lieux et les populations touchées par la catastrophe nucléaire.

 

Voici, par l’intermédiaire du voyageur D. Balaÿ, quelques nouvelles fraîches de Fukushima :

 

A quelques exceptions notables près (chantiers de reconstruction et décontamination, présence de stations de mesure atmosphérique dans les lieux publics, moins d'enfants dans les rues, discussions centrées sur l’urgence de la situation, nombreuses initiatives locales, etc.), la vie est normale dans la ville de Fukushima.

 

 

579590_210399855748128_150979312_n.jpgCôte de Minamisoma, 25 mai 2012 (image Youdou Takeushi), dans le fond on aperçoit la toute nouvelle ligne construite par Tepco qui envoie de l'électricité produite par géothermie jusqu'à la centrale de Fukushima-daichi

 

 

 

Les quelques mesures que Dominique Balaÿ a pu faire confirment des valeurs élevées de radioactivité. La plupart des gens qu’il a pu rencontrer ne croient plus du tout aux cartes établies par le gouvernement, c’est pourquoi la « carte mentale » des zones contaminées qu'ils se sont créés démarre plutôt à la sortie de la ville ou les quartiers périphériques, comme Watari. Dans ce quartier, 50% des enfants ont pu être évacués.

 

La grande ville de Fukushima est équivalente en population à la 5 ou la 6ème plus grande ville française. « S'ils envisagent un voyage en dehors de la ville, les gens peuvent aller jusqu'à louer une voiture pour ne pas contaminer leur propre voiture, celle où ils transportent habituellement leurs enfants. Mais là on touche à des structures mentales très profondes : la ville, c'est le lieu où on se réunit pour se protéger, et éventuellement prospérer ensemble, comment pourrions nous y être en danger plus qu'ailleurs ou autant qu'ailleurs ? »

« Il y a de çà je pense, plus le fait, confirmé par l'ensemble des personnes rencontrées d'un intense stress qu'ils ne peuvent plus supporter (un an et demi c'est très long ...) et qui les pousse à ranger le dosimètre dans le tiroir de la cuisine, et à faire comme si. C'est d'ailleurs l'un des axes de communication du gouvernement : "le stress occasionne plus de dégât que l’évènement lui même". »

 

 

428375_211666925621421_322132877_n.jpgKika-zaru : singe sourd + Iwa-zaru : singe muet + mi-zaru : singe aveugle, stationnant sur le bulletin édité par Kohei à l'attention des personnes d’un camp de réfugiés

 

 

 

« Zone grise, substance noirâtre, multiples strates d'informations : les japonais ont une histoire que je viens de découvrir avec 3 singes, le singe qui ne voit pas, le singe qui n'entend pas et le singe qui ne parle pas. Ce qu'il y a d'important dans cette histoire, c'est qu'il s'agit de trois singes différents et pourtant indissociables, des compères. On peut avoir une connaissance d'un évènement ou d'un fait scientifique, historique et ne pas agir en fonction de ce fait et de cette connaissance : c'est un peu l'impression que j'ai ici ... on peut avoir des yeux et ne pas pouvoir parler, un cerveau et ne pas pouvoir agir ... étrange impression. C'est vraiment la "zone grise", grey zone. Comme dans le Stalker de Tarkowski, le passage est là tout proche, tout le temps là, et pourtant il semble impossible à atteindre, comment se guider dans un tel brouillard ? Jusqu'à quel point compter sur les autres (la presse, les politiques, les médias, les scientifiques, le voisinage, etc.) ? Oui difficile de se guider même à plusieurs, surtout à plusieurs. La science, ou disons la véracité des faits, devrait pouvoir éclairer, au mieux cela agace (comme une rage de dents peut agacer), au pire cela est répulsif (cachez ce dosimètre que je ne saurai voir ...). D'où cela peut il venir alors ? De par ma formation et mes aspirations, j'ai tendance à penser que l'art, la musique, la poésie sont une voie de connaissance possible. Pour tous, je ne sais pas, pour certains sans doute. »

 

C'est l'une des bases du projet que mène Otomo Yoshihide et le festival qu'il organise du 15 au 26 août prochain à Fukushima. Dominique Balaÿ est allé à leur rencontre. Il en ramène aujourd’hui des images et des sons. A suivre !

 

154593 211672025620911 191362960985151 364700 1912557101 n Village de réfugiés du nucléaire

 

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En savoir plus

 

Open sounds : Des sons enregistrés/capturés au Japon, en France, sur les réseaux …

 

Une présentation de ce projet sur France Culture dans l’émission de Thomas Baumgartner, l’Atelier du son (2èmepartie).

 

Et pendant ce temps-là, à Fukushima sur webSYNradio

 

Album de voyage

 

 

 

 

371171_1694364385_1904902817_n.jpgQui est Dominique Balaÿ ?

 

Né en 1968 à Maisons Laffitte, Dominique Balaÿ vit à Nîmes et travaille dans l’industrie du web, chargé de cours à l’université de Nîmes, créateur de webSYNradio, membre du comité de rédaction de la revue Droit de Cités.
Ayant contribué à diverses revues littéraires et artistiques (Ralentir Travaux, Le Mâche Laurier, Variable, Autre Sud…), il a également publié Intérim, aux éditions JCB en 1998 et Le mal est fait, aux éditions Rafael de Surtis en 2000.

 

Dominique Balaÿ anime aussi la revue de création Numérique Nîmes Sources Adultes. En 2009, il lance le projet webSYNradio à l’invitation de la revue Droit de Cités. WebSYNradio propose des interventions inédites de personnalités (artistes, intellectuels, chercheurs, écrivains …), la plupart reconnues sur la scène internationale.

 

En 2010, en prolongement du projet webSYNradio, il participe à la création de MACROSILLONS, sculpture sonore et collaborative présentée dans différents contextes (galerie, musée).
Avril 2011, diffusion sur France Musique, de la pièce sonore Dans la brèche (Jacques-Marie Bernard, Salvatore Puglia & Dominique Balaÿ).
Juillet 2011, participation au projet Fukushima!

 

(Source)

 

 

 

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commentaires

P
@ Stéphane<br /> Voilà les dernières nouvelles du n°1, provenant de l'excellent site de l'ACRO : "Mercredi 23 mai, selon les calculs effectués par la Japan Nuclear Energy Safety Organization, qui est sous la<br /> tutelle du ministère de l'industrie, le niveau d'eau dans la cuve du réacteur n°1 pourrait n'être que de 40 cm, alors que TEPCo annonce 1,9 m. L'organisation pense qu'un trou de 2 cm au niveau du<br /> cicuit primaire est responsable de la fuite. 40 cm, c'est très peu, rendant le réacteur très fagile. La moindre suspension de l'injection d'eau et le combustible fondu est découvert et se remet à<br /> fondre et rejeter de la radioactivité. TEPCO espère pouvoir faire une endoscopie d'ici la fin de l'année pour mesurer ce niveau."<br /> <br /> Lien (valable aussi pour le suivi des autres réacteurs) :<br /> http://www.acro.eu.org/chronoFukushima.html#1
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S
Salut Pierre,<br /> ...<br /> Pourrais tu m'expliquer comment TEPC arrive a gérer<br /> le réacteur 1 dans un environnement confiné,<br /> radioactivité en flèche normalement...<br /> ...<br /> Gérance de la Spent Pool difficile ?<br /> ...<br /> Ouvriers ?<br /> ...<br /> Même cas pour le numéro 2 ?<br /> ...<br /> Un avis suffiras si t'est la,<br /> ...<br /> Merci, sb (CH)
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R
Une initiative très intéressante. Des observations qui témoignent de la rudesse de la vie quotidienne, de la difficulté de la lutte au long cours, que nous poursuivons, que les générations futures<br /> reprendront.
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Une analyse critique des données concernant les rejets des eaux radioactives de la centrale de Fukushima Daiichi initiés en août 2023, dossier réalisé par la CRIIRAD qui tente de répondre à ces questions : Quels sont les principaux défis auquel est confronté l’exploitant de la centrale ? Quels sont les éléments radioactifs rejetés dans le Pacifique ? Les produits issus de la pêche sont-ils contaminés ? Est-il légitime de banaliser le rejet d’éléments radioactifs, notamment du tritium, dans le milieu aquatique ? Qu’en est-t-il en France ?

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