29 avril 2017 6 29 /04 /avril /2017 09:22

Pourquoi, 18 mois après la catastrophe nucléaire de Fukushima, les Japonais ont-ils mis au pouvoir Shinzo Abe, pronucléaire notable ? Sans doute grâce au mensonge politique, mais aussi à cause de la complexité du monde. En France, c’est le même problème, les Français sont majoritairement pour la sortie du nucléaire mais ils vont élire un ou une pronucléaire. Avec une industrie atomique en faillite, une sécurité des installations au rabais et une probabilité d’accident nucléaire qui augmente, l’avenir paraît bien sombre. Au Japon, le mensonge organisé permet à présent au gouvernement de demander à la population évacuée en 2011 de revenir vivre dans des terres contaminées. Les articles du site Nos Voisins Lointains 3.11 rapportent le travail d’une association qui édite des cartes de mesures de la radioactivité. Le constat est alarmant. Ce ne sera pas différent pour les prochains pays qui auront à subir une catastrophe nucléaire.

PF

 

1. Namie: retour de la population dans la zone non-contrôlée de radioactivité

2. Dernière carte concernant la ville de Minamisoma

3. Discours de Taro Yamamoto : « Retournez, habitez, vivez, reconstruisez, c’est quoi cette histoire ! »

 

-oOo-

 

 

1. Namie: retour de la population dans la zone non-contrôlée de radioactivité

 

(A partir de l'article publié par Nos Voisins Lointains 3.11 le 23/4/2017)

 

Le 31 mars de cette année, les ordres d’évacuation des territoires les plus habités du bourg de Namie, du département de Fukushima, ont été levés.

 

Le groupe de mesure citoyen, « Le Projet de mesure de la radioactivité environnementale autour de Fukuichi (la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi) » a publié les cartes de débit de dose de la radioactivité ambiante, et de la contamination du sol. Les résultats sont incroyables. La radio contamination des territoires de Namie est bien pire que celle habituellement relevée en « zone contrôlée de radioactivité ». En effet, une zone est classée comme « zone contrôlée de radioactivité » si le total de la dose effective due à la radiation externe et celle due aux substances radioactives dans l’air risque de dépasser 1,3 mSv par trimestre, ou si la densité de contamination de surface dépasse 40 000 Bq/m². Dans une « zone contrôlée de radioactivité », il est interdit de manger et de boire, et bien sûr d’y passer la nuit. Seuls les adultes y sont autorisés, et il ne leur est pas permis d’y demeurer plus de 10 heures. En quittant la zone, ils doivent se soumettre à un dépistage strict de radioactivité.

 

Les relevés effectués à Namie figurés dans les cartes vont bien au-delà de ces chiffres de référence utilisés pour définir les « zones contrôlées de radiation ». C'est pourtant sur un tel territoire que l'on fait revenir la population !

 

Voici la carte de la contamination du sol téléchargée sur leur page Facebook le 15 avril.

Elle a dû être légendée par 7 échelles car la contamination est si élevée que les échelles habituellement utilisées n'y suffisaient pas ! C'est une violation des droits de l'homme que d'autoriser les gens à vivre sur de tels sols !

Retour de la population dans la radioactivité

Voici la publication du groupe « Le Projet de mesure de la radioactivité environnementale autour de Fukuichi » sur leur page facebook du 20 avril 2017.

« Nous avons téléchargé la carte des relevés de radioactivité, le résultat de la 38ème action de surveillance, en nous appuyant sur le GyoroGeiger, dosimètre fonctionnant avec Android. Les mesures ont été effectuées à 1 mètre du sol. Les points où le débit de dose est supérieur à 1 µSv/h, pour 56 relevés sur 100 effectués, sont indiqués en rouge. Mesure maximale à 3,71 µSv/h soit l'équivalent de 32 mSv/an. Est-il concevable de faire revenir les personnes évacuées, dans de pareils lieux ? »

Retour de la population dans la radioactivité

 

2. Dernière carte concernant la ville de Minamisoma

 

L'article entier concernant cette carte :

Les niveaux impressionnants de radio-contamination à Odaka, Minamisoma

 

Retour de la population dans la radioactivité

3. Discours de Taro Yamamoto

« Retournez, habitez, vivez, reconstruisez, c’est quoi cette histoire ! »

 

(Reprise de l’article de Nos Voisins Lointains du 12/12/16)

 

Taro YAMAMOTO, du parti libéral, est membre de la Chambre des conseillers. Il est un des rares membres parlementaires qui défendent les droits des victimes de l’accident de la centrale nucléaire de TEPCO Fukushima Daiichi.

 

L’association Nos Voisins Lointains 3-11 a traduit les questions de Taro YAMAMOTO à la Commission spéciale de reconstruction de la Chambre des députés au 18 novembre 2016*. Le contenu de ses questions révèle la situation inhumaine à laquelle sont confrontées les victimes dans le cadre de la politique de retour du gouvernement japonais.

  • Taro YAMAMOTO

Je vous remercie. Je suis Taro YAMAMOTO du parti libéral. Je voudrais poser des questions en tant que représentant d’un groupe parlementaire.

 

Décrété le 11 mars 2011, l’état d’urgence nucléaire n’est pas encore levé à ce jour, 5 ans et 8 mois depuis l’accident à la centrale nucléaire de TEPCO Fukushima Daiichi. Aujourd’hui, je vais aborder un sujet connu parfaitement par Mesdames et Messieurs les Députés ici présents.

 

Je vais commencer par le sujet de la zone contrôlée de radioactivité. Il s’agit de la zone délimitée fréquentée par des travailleurs possédant la connaissance professionnelle, exposés aux risques liés aux rayonnements ionisants, telle que une salle de radiographie, un laboratoire de recherche, une centrale nucléaire, etc.

 

Voici ma question. Il y a des règles qui s’appliquent aux zones contrôlées de radioactivité, n’est ce pas. Peut-on y manger et boire ?

 

  • Expert du gouvernement (Seiji TANAKA)

Voici la réponse. Suivant l’ordonnance sur la prévention des risques liés aux rayonnements ionisants**, il est interdit de manger et boire sur les lieux de travail où existe le risque d’assimiler des substances radioactives par voie orale.

 

  • Taro YAMAMOTO

Bien entendu, il est interdit d’y boire ou manger. Donc, il est évident que ce n’est pas possible d’y passer la nuit, n’est ce pas ? Même pour les adultes, il n’est pas permis d’y demeurer plus de 10 heures.

 

Vous connaissez bien l’existence de l’ordonnance. Il s’agit d’une règle à respecter afin de protéger les travailleurs exposés aux risques liés aux rayonnements ionisants dans des établissements tels que les hôpitaux, les laboratoires de recherche et les centrales nucléaires, n’est ce pas ?

 

On y trouve la définition de la zone contrôlée de radioactivité. Il s’agit de l’article N°3 de l’ordonnance dans le dossier N°1. On peut y lire que si la situation correspond soit à la définition décrite dans l’article 3/1 soit à celle précisée dans 3/2, la zone est considérée comme zone contrôlée, et qu’il faut y poster un panneau de signalisation. Je vais lire les parties 1 et 2 de cet article.

 

1 : la zone dans laquelle le total de la dose effective due à la radiation externe et celle due aux substances radioactives dans l’air risque de dépasser 1,3mSv par trimestre – sur une durée de trois mois ! On appelle la zone « la zone contrôlée de radioactivité » lorsque la dose atteint 1,3mSv sur une durée de trois mois.

 

Dans la partie 3/2, on se réfère à la densité à la surface dans le tableau attaché.

Voici le dossier N°2. Quelle sera-t-elle si on fait la conversion de la densité à la surface par m2 ?

 

  • Expert du gouvernement (Seiji TANAKA)

La conversion donne 40 000Bq/ m2.

 

  • Taro YAMAMOTO

Ainsi, avec 40 000Bq/ m2, la zone est classée comme « zone contrôlée de radioactivité ». Il faut donc bien surveiller non seulement la radioactivité dans l’air mais aussi la contamination de surface, c’est-à-dire la dose au sol des substances radioactives, autrement dit les autres éléments existant dans l’environnement, et gérer la zone délimitée afin de protéger les travailleurs des risques liés aux rayonnements, n’est ce pas ?

 

La zone contrôlée de radioactivité est définie à la fois par le débit de dose de la radioactivité ambiante et par la densité à surface des substances radioactives. Le point est que le risque dans une situation où les substances radioactives sont dispersées est tout à fait autre que celui dans la situation où les sources de rayonnement sont bien identifiées et gérées.

 

Or, actuellement l’ordre d’évacuation appliqué aux zones d’évacuation suite à l’accident de la centrale nucléaire est levé lorsque le débit de dose de radioactivité ambiante devient inférieur à 20mSv/an.

 

Voici ma question. Concernant la contamination, en dehors du débit de dose de radioactivité ambiante, y a-t-il des conditions à tenir compte pour lever l’ordre d’évacuation ? Veuillez répondre par un oui ou un non.

 

  • Expert du gouvernement (Takeo HOSHINO)

Voici la réponse.

Concernant les conditions nécessaires pour la levée de l’ordre d’évacuation, quant aux mesures de radioactivité, il n’y a que la certitude que le cumul annuel de débit de dose de radioactivité ambiante soit inférieur à 20mSv.

 

  • Taro YAMAMOTO

Vous n’avez pas compris. Je vous ai demandé de répondre par un oui ou un non. Y a-t-il d’autres conditions que le débit de dose de la radioactivité ambiante ? Pour lever l’ordre d’évacuation en dessous de 20mSv/an, quelles sont les conditions concernant la contamination?

 

Le fait est que concernant la contamination, il n’y a pas d’autres conditions que le débit de dose de la radioactivité dans l’air. C’est anormal. Vous, qui appartenez à cette Commission comprenez certainement à quelle mesure cette situation est anormale. Dans la définition de la zone contrôlée de radioactivité, en dehors de débit de dose de radioactivité dans l’air, on tien compte des substances dispersées puis déposées, c’est-à-dire de la contamination dans le sol etc., ce qui fait que le critère de 40 000Bq/m2 est établi pour la contamination à surface. Cependant, dans le cadre de la politique de retour pour faire revenir les populations aux territoires où le débit de dose cumulé annuel est inférieur à 20mSv/an, la condition de contamination de sol n’est pas considérée comme nécessaire. Cette dernière ne constitue pas un critère d’évaluation, le seul critère étant le débit de dose de la radioactivité ambiante. Les politiciens et les fonctionnaires qui considèrent cette situation régulière ne méritent pas de recevoir les salaires payés à partir des recettes des impôts. Notre travail est de protéger la vie et la propriété du peuple. Or, vous allégez les conditions. Vous créez à votre gré une règle moins rigoureuse que celle appliquée aux travailleurs possédant la connaissance professionnelle de la radioactivité. Que faites vous !

 

Suite à l’accident de Tchernobyl, des lois ont été établies en Russie, en Biélorussie et en Ukraine, et on y mesure à la fois le débit de dose de radioactivité dans l’air et la contamination du sol. Pourquoi ? Cela va sans dire. C’est parce que c’est difficile de saisir la quantité d’irradiation subie par la population seulement avec les mesures de la radioactivité ambiante. En Ukraine, avec 5mSv/an, mesure correspondant à celle de la zone contrôlée de radioactivité, la population est évacuée, et même avec 1mSv/an qui correspond à la limite du débit de dose moyen pour le public, les habitants ont le droit d’évacuer. Cette loi dite loi Tchernobyl est encore en vigueur.

 

En revanche, quelle est la situation au Japon ? Selon la décision du Cabinet du mois de juin 2015, l’ordre d’évacuation est levé si le débit de dose dans l’air est inférieur à 20mSv/an. Il n’y a pas de problème ! A titre d’exemple, si on demeure 24h dans une zone contrôlée de radiation, on est exposé à la dose de 5,2mSv/an. Or, le critère de la levée de l’ordre et du retour de la population est de 20mSv/an ou moins. Le zonage est déterminé par la dose 4 fois supérieure à celle de la zone contrôlée de radioactivité. Retournez, habitez, vivez, reconstruisez, c’est quoi cette histoire ! Je ne peux trouver d’autre expression que « complètement tordu». Peut on encore appeler ça l’État ? Je pense qu’il vaut mieux l’appeler la mafia. C’est tellement inhumain !

 

Le gouvernement semble avoir adopté les limites de dose de 20 à 100mSv suivant la recommandation de la CIPR*** sur les limites d’exposition aux rayonnements après un accident. Cependant, quand on pense aux effets sanitaires sur la population, le plus raisonnable serait d’adopter 1mSv, les mesures de dose les plus faibles pour les limites de radiation pour la santé publique, selon le consensus mondial. Le droit d’évacuer doit être accordé à la population jusqu’à ce que le débit de doses descende en dessous de 1mSv/an. Le droit de décider le moment de retour appartient aux victimes. Pourquoi aménagez vous le zonage à votre gré ? L’État doit faire le maximum d’efforts afin de diminuer la dose le plus près possible de 1mSv/an, dose maximale en situation normale. Puis l’État, l’administration devraient avertir les populations, et les laisser prendre leurs propres décisions. Cela serait la façon la plus juste. L’État devrait se comporter ainsi.

 

Qui est responsable de cet accident ? C’est la TEPCO. Qui l’a soutenue ? C’est l’État. On voit clairement qui sont les auteurs du crime. Et pourtant, on ne fait que soulager les charges des criminels. Si il est admis d’aménager le zonage et les droits associés comme cela convient aux criminels, ce monde est un enfer.

 

Dans la ville de Minamisoma située dans la région côtière de la préfecture de Fukushima, trois types de zone d’évacuation ont été établis après le séisme. Au mois de juillet 2016, l’ordre d’évacuation a été levé de la « zone de préparation de levée de l’ordre d’évacuation » et de celle « de restriction d’habitation ». Il n’y a qu’un seul foyer avec deux personnes qui reste dans la « zone où le retour est difficile ». Selon l’État, 90% des territoires de Minamisoma sont sans risque. Or, il existe un groupe qui s’appelle « Le Projet de mesure de la radioactivité environnementale autour de Fukuichi (la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi) ****» composé principalement de résidents de Minamisoma. Depuis 2012, les membres prennent les mesures de la contamination du sol aux alentours des voisinages des membres et dans des zones d’habitation. Ils ont fourni les informations. Veuillez regarder le dossier N°3. Vous y voyez une carte colorée (NDT : voir la carte dans la page du lien en cliquant ici.)

 

Il s’agit de la carte de mesures de sols, collectés et mesurés, dans les territoires où les travaux de décontamination sont achevés. Les couleurs montrent les niveaux de contamination. L’endroit coloré en bleu indique le lieu où les mesures de contamination sont en dessous de 40 000Bq/m2, c’est-à-dire inférieures à celles de la zone contrôlée de radioactivité. Il n’y en a qu’un seul, à droite en bas. A part celui-là, à tous les autres lieux, les couleurs montrent des mesures supérieures à celle de la zone contrôlée de radioactivité. Il existe même un lieu coloré en gris où les mesures dépassent 1 000 000Bq/ m2. Il y a des gens qui y habitent !

 

Comparé aux débits extraordinaires observés tout de suite après l’accident, le débit de dose de radioactivité dans l’air a beaucoup baissé. Ce n’est pas le même ordre de grandeur. Toutefois, selon les habitants, même avec 0,1µSv/h de débit de dose de radioactivité ambiante, les mesures de sol peuvent se révéler équivalentes à celles de la zone contrôlée de radioactivité.

 

C’est insensé que seul le débit de dose de la radioactivité ambiante soit pris en compte comme condition pour lever l’ordre d’évacuation. C’est tellement irresponsable et négligeant. C’est exactement à l’opposé de protéger la vie et la propriété du peuple. Les gens ne vivent pas flottant en l’air à 1 mètre du sol*****. Ils s’assoient, s’allongent par terre, ils s’arrêtent pour bavarder, debout ou assis. Les enfants ne jouent pas que sur les voies asphaltées. Ils peuvent s’aventurer dans les buissons. Les enfants jouent librement. Il y en a qui mettent de boues dans la bouche. Rappelez vous comment vous étiez quand vous étiez petit. Les gouttières où la contamination est concentrée fournissent un des terrains de jeux favoris aux enfants.

 

M. Masuchika Kono qui fait partie du groupe du projet mentionné ci-dessus, qui était du département d’Ingénierie de l’université de Kyoto, spécialisé dans génie nucléaire, diplômé pour la manipulation du rayonnement, a collecté de la terre au bord de la route de Minamisoma Michi-no-eki (aire de services et de stationnement), et passé au tamis d’environ 100 micron. Les mesures ont montré le résultat de 11 410Bq/kg de Cs. Ces poussières se lèvent avec les vents et aux passages des véhicules. Dans la vie quotidienne, on aspire les poussières. Vous ne tenez pas compte de la radiation interne, n’est ce pas ? Vous calculez la quantité de la radiation interne en appliquant quelconque coefficient, mais ne tenez pas compte de la radiation interne dans la vie réelle.

 

Certaines personnes ont auto-évacué des régions situées en dehors des zones sous ordre d’évacuer, car elles considèrent que les politiques de l’État ne protègent pas les enfants, leurs vies. Auprès de ces personnes, dans le cadre de la loi sur le secours en cas de désastre et d'assistance aux sinistrés******, les logements – habitations « considérées comme logements temporaires******* » - ont été mis à la disposition. Cependant, au mois de mars l’année prochaine, la mise à disposition à titre gracieux sera suspendue. Vous leur dites « il n’y a plus de problème ; pourquoi continuez vous à rester évacués ? » C’est ainsi, n’est ce pas ? Ces déplacés en provenance des territoires situés en dehors des zones d’évacuation sous ordre d’évacuer, ont fuit parce que leur domicile ainsi que l’environnement de vie sont contaminés suite à l’accident nucléaire de TEPCO. Toutefois, comme leur domicile est situé à une certaine distance de la centrale nucléaire, il n’a pas été inclus dans les zones d’évacuation que l’État a établies unilatéralement. Par conséquent, ces déplacés ne bénéficient d’aucune aide publique sauf la mise à disposition de logements à titre gracieux. Et même cette aide va s’arrêter au mois de mars prochain. C’est invraisemblable d’arrêter l’aide. De plus, que signifie-t-il de l’arrêter au mois de mars ? C’est la saison où la mobilité est la plus élevée dans l’année. Vous les expulsez, les forcez à se reloger à la saison où les loyers et les frais deviennent les plus coûteux ! Vous n’avez aucune compassion. Vous êtes impitoyable !

 

 

Voici quelques témoignages.

 

« J’ai peur des enquêteurs de la préfecture métropolitaine de Tokyo faisant la visite de porte à porte. Je me cache sous la couverture de peur d’entendre la sonnerie à la porte. Quand j’ai ouvert la porte, l’enquêteur a coincé la porte avec son pied pour que je ne puisse pas la fermer. Avec une voix forte que touts les voisins pouvaient entendre, il m’a crié « vous savez très bien que vous ne pouvez habiter ici que jusqu’au mois de mars ». Je sais, mais je ne peux pas déménager. »

 

La personne suivante. « La préfecture métropolitaine de Tokyo exige le déménagement de manière acharnée et hautaine. Nous avons dû quitter notre domicile à cause de l’accident de la centrale nucléaire. Je ne comprends pas pourquoi ils nous chassent ainsi de nouveau. J’ai cédé à la pression, et je me suis inscrite à la demande de logement de la préfecture métropolitaine de Tokyo (NDT : payant), mais c’est contre mon gré. Psychologiquement, je n’arrive pas accepter le fait, et cela me cause de la peine. Ils me forcent à emménager dans un logement de préfecture où personne de mon pays ne vit. C’est comme abandonner les personnes âgées dans une montagne. »

 

Le témoignage suivant. Il s’agit d’un foyer composé de la mère et les enfants. Les autres membres de la famille sont restés à Fukushima. Ils mènent la vie à double foyer. « S’il n’y a pas de logement à titre gracieux, on a pas de ressource pour payer le loyer. Le seul rêve qui est resté à mon enfant est la leçon de piano. Ne lui enlevez pas ce rêve. »

 

La personne suivante. « La date limite n’est pas arrivée… » (NDT : YAMAMOTO ne peut plus contenir les larmes) Qui fait une chose pareille ? Je vous demande pardon. Qui ordonne une chose pareille ? On peut à la limite admettre que l’État sollicite les gouvernements locaux pour que ces derniers mènent les négociations polies auprès les déplacés. Non, ce n’est autre chose qu’expulsion. L’État n’a-t-il pas l’intention d’arrêter une pareille situation ? Je ne vous permets pas de dire que vous n’étiez pas au courant. Vous voyez le problème sous vos yeux, maintenant !

 

« Les appels téléphoniques insistants, les visites sans préavis, et ils me crient en me demandant quelle est mon intention. Ils envoient des dossiers, et laissent les avis de passage dans la boîte aux lettres. Je suis complètement épuisée, physiquement et psychologiquement. » C’est compréhensible. Ils continuent à vivre ainsi depuis les explosions de la centrale nucléaire, et 5 ans et 8 mois après, ils sont traqués dans une situation pareille. Jusqu’à quel point souhaitez vous déchirer le cœur des victimes ? Il suffit que l’État prenne la décision. Cette personne dit que la préfecture métropolitaine de Tokyo lui a demandé de quitter le logement, car la préfecture doit rendre le logement de fonctionnaires d’État au mois de mars. C’est monstrueux que l’État demande à la préfecture métropolitaine de Tokyo d’expulser les évacués et de lui rendre le logement en état propre. Les déplacés n’ont pas pu choisir le logement. Ce n’est pas leur faute.

C’étaient des témoignages de déplacés.

 

Selon ma recherche, à ce jour, il existe 9327 pièces vides parmi les logements de fonctionnaires d’État dans la région de Kanto incluant la préfecture métropolitaine de Tokyo et 6 autres préfectures. Si l’État prend la décision, il peut résoudre le problème, tout au moins partiellement. Pourquoi doit-on expulser les habitants ? Est-ce parce que, s’il y a des occupants, on ne peut pas vendre l’immeuble lors des bulles financières des Jeux Olympiques ? C’est trop cruel.

 

Le 4 avril l’année dernière, selon le journal Mainichi shinbun, l’État ne demande pas le remboursement auprès de TEPCO pour les loyers des logements « considérés comme logements temporaires ». Le Membre de la commission, Iwabuchi, a mentionné tout à l’heure en me répondant : le gouvernement obligera TEPCO à payer les frais des travaux de décontamination. Pourquoi vous ne demandez pas à TEPCO de payer les loyers ? Ces gens-là sont les victimes !

 

Enfin, je voudrais demander au M. le ministre. Je voudrais que vous répondiez à deux questions.

 

1ère : Vous avez dit que c’est ce que souhaite la préfecture de Fukushima. Cependant, vous êtes en situation de faire cette suggestion à la préfecture de Fukushima. Veuillez la consulter à nouveau. Cette situation est vraiment irrégulière.

 

2ème : Je vous prie d’écouter les voix des déplacés. Je pense que vous n’avez presque aucune occasion d’entendre les voix des auto-évacués en provenance des territoires situés en dehors des zones d’évacuation. Jusque là, vous étiez trop occupé. Peut-être les personnes autour de vous ont pris la connaissance de leurs témoignages. Veuillez les écouter vous-même. Aujourd’hui aussi, ils sont là. Il y a une pause après. Vous serait-il possible de leur accorder 5 minutes. Si vous nous accordez juste 5 minutes aujourd’hui pendant la pause, vous pourrez converser avec les auto-évacués.

 

Je vous prie de bien vouloir répondre à ces deux questions.

 

  • Secrétaire d’État (Masahiro IMAMURA)

Ainsi que je vous ai déjà répondu, je veux bien consulter la préfecture de Fukushima, et j’aimerais faire en sorte que les personnes concernées ne seront pas peinées. Je veillerais à son bon déroulement.

 

Vous avez dit que les personnes auto-évacuées sont là. Moi aussi j’ai une séance plénière après et je n’ai pas de temps, mais je les écouterai.

 

  • Président (Mitsuru SAKURAI)

M. Yamamoto, vous avez épuisé votre temps.

 

  • Taro YAMAMOTO

Je vous remercie.

Je vous prie de bien vouloir garder votre promesse tout à l’heure. Merci beaucoup.

 

_____

 

Nous remercions Hervé Courtois de Fukushima 311 Watchdogs pour sa relecture.

_____

 

* Source : Site web de Taro YAMAMOTO

** Ordinance on Prevention of Ionizing Radiation Hazards, Ministry of Labour Ordinance No. 41 of September 30, 1972, Latest Amendments: Ministry of Health, Labour and Welfare Ordinance No. 172 of July 16, 2001 (dernier amendement : le ministère de la Santé, du Travail et de la Protection sociale, N°172, du 16 juillet, 2001)

*** Commission internationale de protection radiologique

**** Fukuichi shûhen kankyôhôshasen monitoring project

***** Les mesures de la radioactivité ambiante sont prises à 1m du sol.

****** Saigai kyûjohô, Loi d'assistance en cas de désastre, lois N°118 du 18 octobre 1947

******* Minashi kasetsu jyûtaku. Logements de location gérés par des agences privées habités par les évacués dont le loyer est pris en charge par le gouvernement central ou les gouvernements locaux.

Partager cet article

Repost0

commentaires

S
salut pierre,<br /> <br /> une partie de moi voudrais croire que le Japon<br /> va s'en sortire, que l'effet radioactif un peu partout n'est<br /> peut-être pas si dangereux...<br /> <br /> Par contre, quand on voit, par exemple, les cartes plus haut, c'est<br /> difficile d'être objectif...<br /> <br /> On ne peut normalement que faire dans le défaitisme<br /> ou difficilement, dans l'optimisme, mais...<br /> <br /> Salut Pierre et bn chez-toi, ste
Répondre
P
Dernières nouvelles via le site Nos Voisins Lointains 3.11 : le feu de Namie n'est toujours pas maîtrisé. Les informations des autorités sont-elles fiables ? Question légitime étant donné que le gouvernement a choisi le déni du danger des faibles doses ! <br /> http://nosvoisins311.wixsite.com/voisins311-france/single-post/2017/05/06/Incendie-forestier-%C3%A0-Fukushima-les-donn%C3%A9es-fiables-ou-la-d%C3%A9sinformation
Répondre
R
Combattre la politique du retour reste une nécessité. Les "exilés" doivent continuer à bénéficier des aides indispensables.
Répondre
S
Bien sur Roland, mais si la<br /> plupart des régions vonts de pire en pire...<br /> ...<br /> Je m'inquiète aussi pour l'état de l'eau sur tout<br /> le territoire du Japon, et des conséquences<br /> pour la popullation...<br /> ...<br /> L'eau est la base de la vie, mais<br /> quand elle est gravement irradiée, quelles<br /> répercutions ?...<br /> ...
S
Salut Pierre,<br /> ... <br /> Toujours le temps de lire tes* articles...<br /> ...<br /> Comme on a vécu ensemble l'accident nucléaire, ça fait<br /> beaucoup de points communs. Merci de continuer les témoignages<br /> et autres articles qu'on lis régulièrement j'imagine. (tes lecteurs).<br /> ...<br /> Amicalement, stéphane, (CH).<br /> ...<br /> *(vos)
Répondre
P
Merci Stéphane.<br /> Dernières nouvelles : un incendie vient d'avoir lieu sur une montagne près de Namie. Il faut faire très attention, les fumées remobilisent les poussières radioactives de la forêt contaminée. Ces poussières sont aussi dangereuses que celles de mars 2011. Quand il y a un incendie près de Tchernobyl, c'est le même problème, tout ce qui avait été déposé est relargué dans l'atmosphère. Amis qui vivent au Japon, masque et parapluie fortement conseillés !<br /> Lien vers l'info : http://mainichi.jp/english/articles/20170501/p2a/00m/0na/003000c

  • : Fukushima 福島第一
  • Fukushima 福島第一
  • : Un blog consacré entièrement à la catastrophe nucléaire de Fukushima et à ses répercussions au Japon et dans le monde.
  • Contact

Mentions légales

Directeur de la publication :

Pierre Fetet

Lien vers les mentions légales du blog de Fukushima

Soutien au blog de Fukushima

C'est ici !

 

 Chaîne vidéo du blog de Fukushima

 

BD : Fukushima-Chronique d'un accident sans fin (Bertrand Galic, Roger Vidal)

 

Présentation de la BD par l'éditeur

Dossier documentaire 10 pages sur Fukushima (Pierre Fetet)

 

Dossier sur le rejet des eaux contaminées dans le Pacifique

« Fukushima - Rejets dans le Pacifique : clarification et mise en perspective »

Une analyse critique des données concernant les rejets des eaux radioactives de la centrale de Fukushima Daiichi initiés en août 2023, dossier réalisé par la CRIIRAD qui tente de répondre à ces questions : Quels sont les principaux défis auquel est confronté l’exploitant de la centrale ? Quels sont les éléments radioactifs rejetés dans le Pacifique ? Les produits issus de la pêche sont-ils contaminés ? Est-il légitime de banaliser le rejet d’éléments radioactifs, notamment du tritium, dans le milieu aquatique ? Qu’en est-t-il en France ?

Consulter le dossier

 

 

Spectacle

Le spectacle d'Audrey Vernon "Fukushima, work in progress" est disponible en ligne à cette adresse :

https://www.imagotv.fr/spectacles/fukushima_work_in_progress

 

 


 

Outil de traduction gratuite de site Internet

Actualités sur Fukushima

L'ACROnique de Fukushima

Les Veilleurs de Fukushima

Nos voisins lointains

The Watchers of Fukushima

Projet Mieruka Fukushima

.

« Sans le web, mémoire vive de notre monde, sans ces citoyens qui n’attendent pas des anniversaires, de tristes anniversaires, pour se préoccuper du sort des réfugiés de Fukushima, eh bien le message poignant de Monsieur Idogawa (maire de Futuba) n’aurait strictement aucun écho. » (Guy Birenbaum, Europe 1, 1er mars 2013)

Infos en direct

webcam tepco 

 Webcam

 TEPCO

.

webcam tepco 1 

 Webcam

 TEPCO 1

.

reacteur2aout2011webcamTBS Webcam

 TBS/JNN

 

radioactivité Tokyo Radioactivité

 à Tsukuba

 en continu

 

 

Éditions de Fukushima

Publications

Le dernier livre de Jean-Marc Royer

 

 

Le dernier numéro d'Atomes crochus

 

 

Frankushima : un essai graphique sur la catastrophe de Fukushima et le risque nucléaire en France. Site dédié : frankushima.com

 

Un livre essentiel sur les conséquences de Tchernobyl

Télécharger la version française ici.

 

Un livret pour tout apprendre sur le nucléaire !

A télécharger ici

 

 

 

 

sitesanspub

Créer un blog gratuit sur overblog.com - Contact - CGU -