26 avril 2013 5 26 /04 /avril /2013 12:29

A l’occasion du triste anniversaire du début de la catastrophe de Tchernobyl, j’aimerais revenir sur un documentaire de Luc Riolon diffusé la première fois par Arte en 2010, « Tchernobyl, une histoire naturelle ? », et qui depuis revient régulièrement pour alimenter de fausses idées sur les bienfaits de la radioactivité. Tout dans ce reportage est fait pour accréditer que les faibles doses sont bénéfiques à la nature et que finalement, Tchernobyl a été une bonne expérience. Bien sûr, beaucoup de choses rappelées dans ce film sont vraies, mais un objectif est clairement fixé dans le scénario : persuader petit à petit le spectateur que la radioactivité n’est pas si dangereuse que ça, en utilisant la technique de la persuasion répétitive.

Des paroles bien choisies

 

Dès le début du film, on se met dans le bain avec l’émerveillement des scientifiques :

« Tchernobyl offre des possibilités de recherche vraiment fascinantes qui rejoignent parfaitement nos pôles d’intérêts et qui ne pourraient être nommées nulle part ailleurs », dit l’un ;

« Tchernobyl nous offre une prodigieuse possibilité de comprendre les conséquences biologiques d’un désastre nucléaire majeur », dit l’autre.

 

Et plus loin, la voix off :

« Dans ce laboratoire à ciel ouvert, les scientifiques allaient mettre au jour des phénomènes tout à fait extraordinaires. »

 

Le scientifique « ancien liquidateur » trouve un mulot en excellente santé dans un endroit « 1000 fois plus radioactif que la normale » (mais pas de dose chiffrée).

 

La voix off : « Plus de deux décennies après la catastrophe, la nature semble de manière surprenante avoir repris tous ses droits à Tchernobyl. »

« Les oiseaux nichent même sur le sarcophage de béton qui recouvre le réacteur défunt à des niveaux de radioactivité un million de fois la normale. »

« Tous ces animaux semblent en parfaite santé ».

 

La zone interdite abrite une espèce rare, le cheval de Prevalsky.

Les vieux chevaux malades sont maintenant en forme et le groupe s’est développé. « Je pense que c’est un paradis ici pour les chevaux » dit la scientifique de Kiev.

 

La voix off : « La végétation est exhubérante. »   

« Comme pour les animaux, les radiations semblent n’avoir aucune conséquence sur la végétation. »

« La forêt rouge allait bientôt devenir un laboratoire des plus étonnants de la planète. »

 

Un autre scientifique, qui cultive son jardin dans la zone interdite, a retiré le raisin, le cassis et l’oseille (sous-entendu plantes qui capturent trop le césium ou le strontium).

« Lenid peut donc tranquillement manger les produits de son jardin, soigneusement vérifiés et sélectionnés. »

 

Robert J. Baker : « Même dans la forêt rouge, la végétation est épaisse et l’habitat est devenu sain. Nous pouvons dire qu’il y a plus d’animaux à l’intérieur de la zone que dans des endroits à l’habitat comparable à l’extérieur des 30 km de la zone interdite. »

 

 

A force d’entendre ces paroles répétées, qu’on s’y sent bien à Tchernobyl ! Il ne reste plus qu’à lâcher des informations « scientifiques », et le tour est joué.

 

 

Détournement d’information et désinformation

 

Au début du reportage, une scientifique de l’IRSN aborde le sujet du plutonium, puis subitement, à 30 min, la voix off annonce que la radioactivité dans la zone de Tchernobyl est due principalement à deux radionucléides toujours présents : le césium 137 et strontium 90. Evaporé le plutonium ! Résultat des recherches sur le plutonium ? Ce n’est pas la peine d’en parler, ce n’est pas intéressant. A Fukushima non plus ce n’est pas intéressant. On en trouve oui, ça on ne peut pas le nier, mais quand à étudier l’effet du plutonium sur le monde vivant… Peut-être ce n’est pas nécessaire car on connaît déjà les conclusions ? Radiotoxique très puissant ? Cancérigène ? Ou bien on peut boire le plutonium sans crainte ?

 

Robert J. Baker, généticien à la Texas Tech University Lubbock : « Nous avons été choqué par ce que nous avons trouvé : un taux très élevé de mutation chez les animaux ». Le scientifique a donc publié un article dans Nature précisant que Tchernobyl a provoqué un déferlement de mutations. Quelques semaines après la parution de l’article, ils refont les analyses avec un autre matériel et découvrent que tout est faux et qu’ils se sont trompés.

Et le scientifique de conclure : « Au jour d’aujourd’hui, on peut dire que non seulement les animaux [les souris de Tchernobyl] vont bien, mais qu’également leur génome n’a pas subi de modification. »

C’est pas beau ça ? Dans ce film, on prend comme base scientifique un gars qui s’est rétracté quelques semaines après avoir publié un article dans une revue scientifique de renom à comité de lecture. Est-ce sérieux ? Je suis entièrement d’accord qu’on puisse faire des erreurs et le reconnaître, c’est une démarche plus que louable. Mais dans ce cas, même s’il n’y a pas eu de pression du lobby nucléaire sur cette équipe scientifique, le réalisateur aurait pu donner la parole à d’autres scientifiques qui avaient d’autres conclusions.

 

Est-ce que cet autre scientifique, Sergey Gashchak, radioécologue à l’International Radioecology Laboratory Slavutich, est également sérieux quand il prétend que les mutations peuvent provenir d’autres facteurs naturels comme des anomalies de la biologie des animaux liées à une carence en nutriments, d’une modification du climat (sécheresse ou grande humidité), d’une augmentation des parasites, etc. ?

Ce même homme assure, squelette de cervidé filmé à l’appui : « Bien sûr le strontium provoque des problèmes de santé aux animaux qui vivent ici, mais le squelette semble parfaitement normal. La cause de la mort n’est pas du tout le strontium. Il a été tout simplement dévoré par des loups. »

Même technique de communication qu’avec le mulot : il montre un seul spécimen et le spectateur est conduit à penser que tous les animaux pètent la forme !

 

Le réalisateur réutilisera la même technique pour les oiseaux : on stigmatise le cas des hirondelles qui présentent des malformations (plumes dissymétriques, vieillissement prématuré, tumeurs, etc. mais c’est de leur faute, elles sont fatiguées), et du coup on sous-entend que tous les autres oiseaux vivant en zone contaminée vont bien.

 

Le reportage finit par faire l’apologie de l’effet Hormésis (les faibles doses seraient bénéfiques, alors qu’il est établi depuis des lustres que tout rayonnement a un effet destructeur sur les cellules). On est sauvés ! Mais bon sang, de quoi se plaignent les populations qui vivent en continu dans les territoires contaminés, à Tchernobyl et à Fukushima ?

 

 

Le reportage sert de support aux experts pronucléaires

 

Jean-Marc Jancovici reprend à son compte en février 2012 le tableau idyllique dressé par le film : « Du point de vue des écosystèmes, et ce n’est pas du tout de l’ironie, un accident de centrale est une excellente nouvelle, car cela crée instantanément une réserve naturelle parfaite », déclare-t-il en février 2012.

Mais n’était-ce pas le but recherché par le réalisateur ? Ou bien celui-ci s’est-il fait influencer par ceux qui l’ont aidé dans sa tâche ? Il faut dire qu’une armada de spécialistes de l’IRSN, organisme bien connu pour minimiser les conséquences sanitaires liées à la radioactivité, l’ont aidé dans ses recherches : Didier Champion (Pôle "Radioprotection, environnement, déchets et crise » à l’IRSN, Marie-Pierre Bigot (direction de la communication à l’IRSN), Pascale Portes (responsable du service de presse à IRSN), Jacqueline Garnier-Laplace (Chef de service Recherche, Expertise et Evaluation d’impact environnemental à IRSN), Patrick Gourmelon (directeur de la radioprotection humaine à l’IRSN), Jean-René Jourdain (direction de la protection de l'homme à l’IRSN) et François Bréchignac (Directeur scientifique adjoint à l’IRSN). Toute cette équipe, supervisée par Dietrich Averbeck, Directeur de recherche émérite du CNRS à l’Institut Curie, mais surtout membre du conseil scientifique de l’IRSN, a joué un grand rôle dans le message global du film.

 

 

Conclusions et commentaires sur le film

 

Depuis qu’il est sorti, ce film très controversé a déjà fait couler beaucoup d’encre. Pour finir, je voudrais reprendre la conclusion d’un très bon article de Michel Fernex, professeur émérite de médecine et spécialiste des impacts sanitaires des radiations (source) :

 

« L’histoire naturelle de Tchernobyl, ce devait être ce qui se déroule dans la nature dans la zone d’exclusion de 30 km de rayon autour du réacteur atomique détruit en 1986. Des chercheurs encore sur place ont consacré des années à l’étude de la faune et ont suivi différentes espèces pendant plusieurs années. Un cinéaste indépendant aurait pu faire profiter les spectateurs de quelques découvertes importantes faites dans ce laboratoire à ciel ouvert, en réalisant un bon documentaire. Il pouvait faire appel au naturaliste du CNRS de Paris Sud, qui travaille sur le terrain depuis plus de dix ans. Avec la collaboration de spécialistes de nombreux pays, Møller & Mousseau décrivent l’impact des rayonnements ionisants sur l’ensemble de la faune. S’en tenir à deux rongeurs médiocrement étudiés dans le terrain et présenter de façon assez confuse ce qui se passe chez les hirondelles, comme si cette espèce était l’exception et non la règle, c’est insuffisant. Volontairement insuffisant.

Pour le monde végétal, le film nous apprend que les pins sont vulnérables et les bouleaux le sont moins, ce qui permet à cette espèce pionnière d’envahir de nombreux espaces, y compris la ville abandonnée de Prypiat. Les fourrés de bouleaux sont d’une grande pauvreté à côté des forêts qui accompagnent les rivières et les fleuves du Bélarus et de l’Ukraine. Il faudra des siècles pour qu’une forêt digne de ce nom renaisse autour de Tchernobyl.

Les spectateurs auront résolu l’énigme proposée par le titre du film. Ils auront découvert la cause de la médiocrité de l’information livrée. À quoi sert cette permanente accumulation de mensonges par omission dont est composé le scénario ? À qui rapporte le crime ? Certes, le réalisateur n’est pas le premier bénéficiaire.

Retenons que le principal objectif statutaire de la puissante agence de l’ONU, l’AIEA, c’est « l’accélération de l’augmentation de la contribution de l’énergie atomique pour la paix, la santé et la prospérité dans le monde entier ». De toute évidence, ses membres comme tous ceux qui touchent indemnités ou salaires de cette institution ne peuvent être que juge et partie face aux problèmes que soulèvent les victimes des accidents nucléaires, principalement quand il s’agit d’humains. Mais l’AIEA est à nouveau contrainte par ses statuts d’étendre la propagande pro-nucléaire dont elle a la charge, en masquant la souffrance de la faune et en inventant des slogans comme « les animaux se sont rapidement remis du choc radiologique qui a suivi l’explosion de 1986. Ils prospèrent magnifiquement ». L’AIEA ne peut plus se servir de la "radiophobie" dont elle a déjà tellement abusé. Les biologistes constatent que de vastes espaces demeurent impropres à la survie de nombreuses espèces ; seule la permanente recolonisation par des animaux venant de l’extérieur, comme chaque printemps les oiseaux migrateurs ou erratiques, permettent le maintien d’une vie maladive dans ce milieu contaminé.

L’AIEA, l’agence, la plus haut placée dans la hiérarchie de l’ONU, dépendant directement du Conseil de Sécurité, soutient le lobby de l’atome et doit à tout prix nier la vérité sur les conséquences de Tchernobyl sur la santé de la faune comme sur celle des humains. »

 

Pierre Fetet

___________________________________

 

Pour en savoir plus :

 

- Sur le reportage d’Arte :

« Tchernobyl, histoire naturelle ? »

Un film de Luc Riolon, écrit par Luc Riolon et Antoine Bamas

Produit par Arte France, Camera Lucida Productions, CNRS Images

en partenariat avec Eurovision Science et la Commission européenne de recherche

Conseiller scientifique : Dietrich Averbeck (institut Curie, CNRS)

 

 

- Avis de Michel Fernex

 

- Avis de Jacques Foos

 

- Avis d’Yves Lenoir

 

- Avis de Bella Belbéoch

 

 

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25 avril 2013 4 25 /04 /avril /2013 00:56
Nucléaire : de la mine aux déchets

 Avec ses 58 réacteurs, la France est le pays le plus nucléarisé au monde. Mais que savent les Français de l’uranium, le combustible sur lequel repose toute l’industrie de l’atome ?

 

Présentée comme un "cycle vertueux" par le lobby nucléaire, l’exploitation de l’uranium cache en réalité une chaîne du combustible sale, polluante et non-maîtrisée.

 

Parce que l’industrie nucléaire fait tout pour le cacher, le jeudi 25 avril 2013, le réseau "Sortir du nucléaire" lance une nouvelle campagne « Nucléaire : de la mine aux déchets, tous concernés ».

 

Avant d’aller consulter le site dédié ,

 

regardez cette petite vidéo introductive et confrontez vos connaissances à la réalité en 3 minutes et demi !

Le rapport avec Fukushima ?

 

C’est l’état d’ignorance généralisé de la population sur l’énergie nucléaire qui a conduit au désastre de Fukushima. C’est pourquoi il est important de diffuser ces connaissances de base afin que personne ne puisse dire demain : je ne savais pas !

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19 avril 2013 5 19 /04 /avril /2013 15:56
Selon Pierre-Franck Chevet, président de l’ASN, Fukushima est classé au niveau 6 sur l’échelle internationale INES

Heureusement j’étais assis quand j’ai entendu à la radio le président de l’Autorité de Sûreté Nucléaire (l’ASN), Pierre Franck Chevet, annoncer sans être contredit que l’accident de Fukushima avait été classé au niveau 6 de l’échelle internationale INES !

Effectivement l’ASN s’était empressée le 15 mars 2011 de classer l’évènement au niveau 6, alors même que des explosions et des incendies se produisaient encore dans les bâtiments réacteurs 2 et 4. Mais un mois plus tard, l’accident avait été reclassé au niveau 7 par les autorités japonaises, ce que reporte le propre site de l’ASN ou celui de l’IRSN. Pierre-Franck Chevet ne peut pas ne pas en être au courant !

Arriver à un tel point de désinformation au sommet des structures françaises est insupportable. Celui qui a la responsabilité de la sûreté nucléaire en France a été pris en flagrant délit de manipulation de l’opinion sur une chaîne publique nationale. Il participait à l’émission « Le téléphone sonne » (Questions sur l’état de la sureté des installations nucléaires) le 17 avril 2013 sur France Inter, avec son collègue Jacques Repussard, directeur général de l’IRSN.

Tous deux étaient là pour désinformer et minimiser. Mais surtout pour marteler que « L’accident nucléaire est possible en France ». Non pas pour faire peur et faire changer la politique énergétique de la France, mais pour trois raisons évidentes :

- habituer les Français à l’idée d’un accident nucléaire,

- justifier leurs activités de protection de l’industrie nucléaire,

- rendre nécessaire l’augmentation des dépenses de sécurité, donc des propres recettes de leurs organismes.

Ils n’étaient pas vraiment là pour répondre aux questions des auditeurs, lisez plutôt :

Question d’un auditeur :

- S’il se passe un accident majeur en France, combien de millions de Français seront impactés ?

PAS DE REPONSE

Question d’un auditeur :

- Quelles sont les mesures que vous pouvez nous conseiller pour protéger nos familles, particulièrement les enfants, en cas d’accident majeur ?

PAS DE REPONSE

Question d’un auditeur :

- Si subitement l’ASN ordonne la fermeture de plusieurs centrales, est-ce que la France peut remplacer au pied levé l’énergie qu’elles produisaient ?

PAS DE REPONSE, sinon un Nième « nous travaillons sur ce scénario »…

Florilège de citations

Quelques évidences, d’abord sur la possibilité d’un accident en France :

Jacques Repussard : « Ces technologies qui ont été inventées il y a 40 ans, 50 ans maintenant, elles ont la possibilité de créer ces accidents très graves. »

Jacques Repussard : « On a laissé des impasses dans le système, on est en train de les combler. »

Quelques justifications économiques :

Jacques Repussard : « On a besoin de travailler sur la préparation de cet accident »

Jacques Repussard : « La bonne santé économique d’EDF, c’est pour moi l’une des clés de la sûreté de notre parc [nucléaire] »

Quelques énormités :

Jacques Repussard : « Quand les accidents comme cela se produisent, c’est forcément une conjonction tout à fait extraordinaire et peu prévisible de différents facteurs indépendants les uns des autres. Un tsunami + un séisme + une centrale qui avait vieilli prématurément, qui n’avait pas mise à l’état de l’art, tout ça ensemble a créé l’accident. »

Alors que justement, un tremblement de terre et un tsunami ne sont pas des éléments indépendants ou imprévisibles au Japon, alors que la centrale de Fukushima n’avait pas vieilli plus « prématurément » que les centrales nucléaires françaises, on se demande vraiment ce que veut dire Jacques Repussard ! La catastrophe de Fukushima était totalement prévisible, comme l’a démontré le rapport de la commission indépendante de la Diète japonaise sur Fukushima.

Pierre-Franck Chevet (à propos de l’échelle de gravité des accidents nucléaires) : « Ca va de 1, l’incident qui est rendu public mais qui est de niveau le plus bas, à 7. Tchernobyl : 7. Fukushima : 6. »

J’en ai déjà parlé dans l’intro, ce mensonge est d’une grande gravité.

Une parole insultante pour les Japonais contaminés :

Jacques Repussard : « [en cas d’accident nucléaire en France] il y aurait relativement peu de morts immédiats voire à terme si la situation est bien gérée et ce sera vraisemblablement le cas au Japon : il y aura probablement un faible impact - on ne le sait pas encore mais c’est assez vraisemblable- il y aura un faible impact sanitaire. »

Des réponses absolument pas rassurantes :

Question d’un auditeur : Les centrales françaises permettraient-elles d’empêcher la formation d’un corium et de son passage à travers le radier ?

REPONSE : NON

Effectivement, aucune centrale nucléaire française ne possède de récupérateur de corium et le syndrome de Fukushima peut se produire dans tous les sites.

Question d’un auditeur : Est-ce que la force d’action rapide est en place, le « GIGN du nucléaire » ?

Pierre-Franck Chevet : « Elle est partiellement en fonctionnement (…) mais on est encore loin du dispositif complet. »

Ce qui signifie que 2 ans après Fukushima, cette force n’est toujours pas opérationnelle.

Pierre-Franck Chevet : « [Dans le cas d’un accident de type Fukushima en France], quelques dizaines de km en Europe, ça touchera beaucoup de monde, et ça touchera, ça concernera aussi les pays frontaliers. »

Si on regarde Tchernobyl et Fukushima, on peut corriger et dire « quelques centaines de km ». Le directeur de l’ASN est trop modeste avec nos voisins européens qui seront touchés de plein fouet.

Pierre-Franck Chevet : « Il y a 20 ans, je travaillais à l’époque pour l’ASN, on a eu une anomalie concernant les couvercles de cuve ; on a été à deux doigts d’être dans cette situation [de devoir changer les couvercles de cuve de plusieurs réacteurs français, et donc de prendre la décision d’arrêter subitement entre 5 et 10 réacteurs]. »

Ah bon, on a été à deux doigts de changer des couvercles défaillants dans les années 90 ? On aurait aimé en savoir plus ! Finalement on n’a pas changé ces couvercles ? Ils ne sont plus défaillants ou bien ils sont encore utilisés aujourd’hui ? De quelles centrales s’agit-il ?

Et enfin à propos des déchets :

Quelle est la durée de vie radioactive du cœur d’un réacteur ?

Réponse de Jacques Repussard : « de l’ordre de la centaine de milliers d’années. »

Pierre-Franck Chevet : « Nous nous attachons à essayer de créer une filière… » JPC s’étrangle. Le projet CIGEO serait-il si embarrassant ?

Quelle est la durée du démantèlement d’une centrale nucléaire ?

Pierre-Franck Chevet : Il ne revient pas sur le « cas complexe » de Brennilis cité par un auditeur (démantèlement commencé il y a 28 ans !). Concernant la centrale de Chooz-A, « le démantèlement avance », mais on n’en saura pas plus !

Source

______________

Photo d’entête : Pierre-Franck Chevet prêtant serment devant la commission d’enquête du Sénat sur le coût réel de l’électricité le 9 mai 2012 (source)

PS : Veuillez m'excuser pour la présentation actuelle des articles et de la colonne de droite. La mise en page est assez nulle. Cela provient du fait que le site a migré de l'ancienne à la nouvelle plateforme overblog et que je ne maîtrise plus grand chose dans l'agencement. Va falloir que je m'y adapte, mais déjà je regrette les nombreuses fonctionnalités très accessibles qu'offrait l'ancienne version... Juste un exemple, Overblog a supprimé une centaine de liens (les veilleurs de Fukushima) et je n'ai pas accès pour le moment à la colonne de droite pour actualiser ce qui reste. PF

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19 avril 2013 5 19 /04 /avril /2013 10:34

Suite à la catastrophe nucléaire de Fukushima débutée en mars 2011, le rouleau compresseur du village nucléaire a réalisé et réalise son implacable programme.

- décembre 2011 : déclaration « d’arrêt à froid » des 3 ex-réacteurs

- année 2012 : opération communication-intox pour marteler que tout est maîtrisé, qu’il y a zéro morts à Fukushima, qu’il n’y a pas de catastrophe sanitaire

- juillet 2012 : redémarrage de la centrale nucléaire d’Ohi, afin de combattre l’idée que vivre sans nucléaire est possible

- avril 2013 : redémarrage du commerce français du MOX avec le Japon, arrêté en 2011, pour continuer à faire de l’argent sur le dos de la santé des populations

Merci aux citoyens français qui se sont mobilisés le 17 avril 2013 à Cherbourg pour rendre visible l’inacceptable : le commerce outrancier et insultant d’une énergie policière et mortifère.

Qu’est-ce que le MOX ?

Le MOX est un combustible nucléaire fabriqué en France composé d’oxydes d’Uranium et de Plutonium. Le réacteur n° 3 de Fukushima Daiichi, qui a explosé le 14 mars 2011, avait été chargé au MOX.

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5 avril 2013 5 05 /04 /avril /2013 16:42
gastein3.jpgDans un article paru le 4 avril 2013 intitulé « Dans les Alpes autrichiennes, on se soigne à la radioactivité », on découvre avec stupeur que le radon serait un gaz radioactif miraculeux. L’auteur de l’article, sans aucun esprit critique ni vérification de ses sources, écrit sans complexe : « la potion se révèle étonnamment bienfaitrice pour des patients souffrant de maladies de peau ou se trouvant victimes d’un système immunitaire affaibli ». Cet article mensonger et dangereux est un exemple type de la manière dont le village nucléaire, dont l’industrie pharmaceutique fait partie, agit pour manipuler l’opinion.   
 
L’auteur de cet article, Patrick Rollo, est soutenu par le site Care Vox qui a un comité de modérateurs. Celui-ci vérifie que les articles proposés respectent le cadre de la politique éditoriale. Comment connaitre cette politique éditoriale ? En cliquant sur ce lien, certes, mais aussi en lisant les articles de Patrick Rollo : pour ce qui concerne le nucléaire, ce qui prévaut est la minimisation des effets sanitaires des faibles doses radioactives, la diffusion de l’idée que les effets psychologiques d’une catastrophe nucléaires sont plus graves que les effets de la radioactivité et, avec ce dernier article, l’appui de l’idée que la radioactivité est bonne pour la santé ! Or cet article est scandaleux : il développe l’idée que le radon est un gaz guérisseur. C’est très grave, car cette assertion est absolument fausse. Le radon est un des agents responsables du cancer du poumon car ses descendants émettent des rayonnements alpha qui peuvent induire le développement de la maladie. En France, une étude a montré que ce gaz radioactif pourrait être responsable du décès de 2500 personnes par an.
 
Retrouver la source
 
La source des « informations » donnée par Patrick Rollo est http://www.gentside.com/sant%E9/en-autriche-un-centre-de-soins-soigne-ses-patients-a-la-radioactivite_art49224.html, qui la reprend de http://www.odditycentral.com/travel/austrias-healing-caves-offer-radioactive-miracle-cure.html, qui la reprend de http://www.pilot-pr.com/blog/a-natural-healing-phenomenon-and-a-spa-holiday-quite-unlike-any-other-my-incredible-gastein-healing-cave-experience/, qui la reprend de http://www.grandparkhotel.at/  et de http://www.gasteiner-heilstollen.com/, c’est-à-dire les bénéficiaires directs de cette fumisterie : la société qui exploite la grotte miraculeuse et l’hôtel qui héberge les gens qui se font avoir.
 
Voici l’incroyable publicité pour le gaz miraculeux

 
 
Mais, contrairement à ses sources, Patrick Rollo « omet » de préciser que le radon est reconnu pour donner le cancer du poumon. Est-ce un oubli, une volonté de faire du buzz avec un article détonnant, ou un excès de zèle dans une désinformation programmée en continu ? Je pencherais pour la dernière hypothèse, selon ce que j’ai pu constater en lisant ses anciens articles. 
 
Une désinformation insidieuse
 
Dès 15 mars 2011, Patrick Rollo écrivait que des pastilles d’iode étaient distribuées à la population, ce qui était loin d’être le cas, comme l’a souligné le rapport sur la catastrophe de Fukushima du Parlement japonais.
 
Le 18 mars 2011, l’auteur rapporte les propos rassurants de « Patrick Gourmelon, qui rappelle qu’en « terme médical, il est admis qu’en dessous de 100 mSv, la dose est faible». Tiens tiens, on a retrouvé ces mêmes propos quelques mois plus tard au Japon dans la bouche de « Monsieur 100 milliSiverts », Shunichi Yamashita, ce « scientifique » qui prétend que « les radiations n'affectent pas les gens qui sourient ».
 
Le 26 avril 2011, il rapporte les conclusions sur Tchernobyl du très controversé « Forum des Nations Unies : « l’impact sur la santé mentale est le plus gros problème de santé publique causé par l’accident à ce jour ». A 25 ans d’intervalle, des spécialistes établissent des parallèles troublants avec « l’après Fukushima ». Cette désinformation avait déjà été amorcée par un article de Laurence Roux-Fouillet publié également sur Care Vox le 18 mars 2011 : en cas de problème nucléaire, « le premier risque est psychologique ». Il y a donc plusieurs auteurs qui sévissent sur ce site pour, semble-t-il, maintenir une désinformation constante sur le web.
 
A qui profite le crime ?
 
Le site Care Vox a été fondé par… leurs fondateurs ; aucun nom de personne n’apparaît dans la rubrique « Fondateurs ». En revanche, des noms de sociétés sont mentionnées : Cybion « société anonyme indépendante dont le capital appartient majoritairement aux fondateurs » ; et « Pharmagest Interactive », « leader dans le développement et la commercialisation de solutions informatiques professionnelles pour les officines et l’industrie pharmaceutique ». La boucle est bouclée, l’industrie pharmaceutique finance la désinformation sur le nucléaire qui est une manne pour elle : le radon  « bienfaisant » produit les cancers, les cancers fournissent les clients !
 
L’article 1 de la ligne éditoriale du site Care Vox, « Garantir la fiabilité et la transparence des informations », est ainsi complètement bafoué. L’information diffusée par le site, pour cet article en particulier, n’est absolument pas fiable puisqu’elle est basée sur le profit de sociétés au dépend de la santé des gens, et elle n’est absolument pas transparente puisqu’aucun nom de responsable n’apparaît dans le site.
 
L’auteur essaie donc, par le biais d’un support informatif « collaboratif » financé par l’industrie pharmaceutique, de nous faire croire des âneries monumentales, pouvant compromettre la santé des gens qui le lisent. Cet article est dangereux, toxique je dirais, et je demande d’urgence son retrait du site Care Vox. J’ai envoyé un message en ce sens aux responsables inconnus du site. Vous pouvez aussi réagir en leur écrivant à cette adresse ou en écrivant des commentaires sur leur page Facebook.
 
Veilleur de Fukushima toujours en colère depuis mars 2011, je ne laisserai pas passer ce genre de mensonge. Chacun doit rester vigilant sur les infos qui circulent sur la toile. Cet article et son auteur ne sont pas les seuls à sévir. La désinformation est constante et insidieuse, financée par des groupes puissants, il faut à chaque fois que c’est possible la dénoncer. Il ne faut pas se taire, ne rien laisser passer, en l’honneur et en soutien des victimes de Tchernobyl, de Fukushima et d’ailleurs.
 
Pierre Fetet
 
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L’illustration d’entête est extraite de la vidéo citée dans cette page.
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En savoir plus sur le radon avec cet article du site "Sornettes" :
 
 
 
 

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31 mars 2013 7 31 /03 /mars /2013 21:22
symposiumFace au rouleau compresseur du village nucléaire mondial qui, comme pour Tchernobyl, utilise toute son énergie et sa puissance financière pour camoufler la vérité sur la catastrophe de Fukushima et ses conséquences sanitaires, des citoyens se mobilisent dans tous les pays pour apporter un autre éclairage.
 
Les nations qui utilisent l’énergie nucléaire et leurs institutions minimisent systématiquement les problèmes engendrés par l’emploi de cette énergie. En cas d’accident, les populations ne sont généralement pas prévenues, ou trop tardivement. En cas de nuage radioactif, on minimise l’importance et l’étendue des pollutions. En cas de contamination de grands territoires, on demande aux populations de rester chez elles et de continuer à vivre en acceptant de respirer et d’ingérer des radionucléides malfaisants en leur faisant croire que tout est maîtrisé. On leur demande d’accepter avec le sourire plus d’inquiétudes et de contraintes, mais en gardant l’espoir de jours meilleurs alors que l’avenir se traduira par plus de maladies.
 
Face à cette négation des dangers des faibles doses orchestrée par des organisations internationales telles que l’AIEA, l’UNSCEAR ou l’OMS, trois rencontres d’envergure se sont tenues depuis deux ans, la première à Genève en mai 2012 organisée par IndependentWHO, la deuxième à Koriyama en décembre 2012 organisée par Nuclear Free Now et la troisième en mars 2013 à New York organisée par la Helen Caldicott Foundation.
 
1. Forum scientifique et citoyen sur la Radioprotection : De Tchernobyl à Fukushima, 12-13 mai 2012, Genève (Suisse)
Le forum a fait l’objet d’une publication française, « Actes du Forum Scientifique et Citoyen sur la Radioprotection : de Tchernobyl à Fukushima ». Il sera bientôt disponible en anglais.
Deux options sont possibles :
 
2. Contre-forum sur Fukushima, 12-17 décembre 2012, Koriyama (Japon)
Un compte-rendu réalisé par Christophe Elain est disponible en français sur le site d’IndependentWHO.
 
3. Symposium: The Medical and Ecological Consequences of the Fukushima Nuclear Accident, 11-12 mars 2013, New York (Etats-Unis)
Accéder au site officiel : toutes les présentations sont disponibles en vidéo et sous forme de fichiers texte en anglais.
 
Appel aux lecteurs : comme pour le Rapport officiel de la Commission d’enquête indépendante sur l’accident nucléaire de Fukushima, j’appelle les lecteurs du blog de Fukushima qui ont des compétences pour réaliser des transcriptions et des traductions anglais-français à se signaler. Une équipe de traducteurs bénévoles est en train de se constituer pour se partager la traduction des 21 communications du colloque de New York. Plus nous serons nombreux, plus la tâche sera répartie.
 
Déjà, l’infatigable Kna a commencé à éditer des communications en français, et grâce à l’aide du groupe des traducteurs, toutes les présentations pourront être ainsi traduites, sous-titrées et diffusées en vidéos et en textes. Voici les premières en ligne :
 
 
 
 
 
 
 

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27 mars 2013 3 27 /03 /mars /2013 21:47

« 15 thèses sur le nucléaire », c’est le titre du dernier article de Jean-Marc Royer qui vient de paraître dans la revue de Sciences-Po, Ecologie et Politique (n° 46). Nous en publions ici l’intégralité, avec l’autorisation de son auteur. Le rédacteur de l’appel « Hiroshima, Tchernobyl, Fukushima : des crimes contre l’Humanité » revient une nouvelle fois sur l’histoire du nucléaire en analysant les rouages des évènements, des horreurs et des crimes commis et sur les conditions similaires à Fukushima qui amèneront, si rien ne change, à une nouvelle catastrophe nucléaire en France. Selon Jean-Marc Royer, « des possibilités immenses » pour changer la donne sont en chacun d’entre nous, « pour peu que nous en sentions la nécessité en tant qu’être humain ».

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15 thèses sur le nucléaire

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Jean-Marc Royer

 

 

« La leçon pourra s’écrire ainsi : toute authentique science politique nouvelle – de celle qu’invoquait autrefois impérativement Tocqueville, et qu’il convoquait comme une nécessité alarmée – ne s’amorcera dorénavant que d’une éthique de la désillusion, portail des œuvres de lucidité. Il n’y aura probablement plus d’autre Éthique pertinente aujourd’hui que celle qui s’amorce dans l’orientation de cet "axe". Qui y établit ses bases. Qui ne dit pas le Bien, mais qui scrute d’abord le Mal. » (1) 

 

Ces thèses ne sont que la suite d’un travail sur le rôle, la place du mode de connaissance scientifique dans l’imaginaire occidental et les préliminaires d’un travail en cours. Elles se situent résolument du côté de la réflexion philosophique qu’impose l’ère nucléaire et sur les traces de Günther Anders (2).

 

Première thèse

Ce 6 août 1945, l’énergie nucléaire s’est d’emblée et massivement imposée à la conscience de l’humanité comme un commandement adressé à chacun, car, dès le lendemain, tous les pouvoirs (sauf Staline qui fulminait), tous les journaux, tous les intellectuels, tous les éditorialistes, tous les philosophes, à l’exception de Simon Charbonneau, Albert Camus et Günther Anders, se sont abandonnés à cette lourde menace, ou pire, l’ont célébrée comme une grande révolution scientifique, voire la promesse d’une ère nouvelle pour l’humanité (3). Mais entre l’exhortation générale à célébrer le progrès, et la conscience diffuse qu’un meurtre de masse venait peut-être encore d’être commis (les photos publiques d’Auschwitz dataient de quelques semaines), tout s’est passé comme si une gigantesque injonction subliminale avait été adressée à l’humanité dans son ensemble, que l’on pourrait ainsi formuler : « tu admireras ma science du désastre », ou, autrement dit, « tu honoreras ce qui détruit l’humanité à laquelle tu appartiens ». Ainsi, comme aux temps des Pharaons, la prosternation fut générale devant cette éclatante démonstration de toute-puissance et, dès le premier jour, le grand œuvre du refoulement fut initié : il fut à la mesure de la menace qui pesait pour la première fois sur l’ensemble du vivant et de l’écosphère. Cet été-là, les trois coups mortifères de la toute-puissance occidentale ont retenti (4) ; le second acte de cette tragédie n’est pas terminé.

 

Deuxième thèse

Toutes les premières photos (vues du ciel, et transmises par les militaires), montrent la dévastation des villes d’Hiroshima et Nagasaki (il faudrait plutôt dire leur volatilisation) qui fut si complète que les mots manquèrent pour le dire : les militaires, les politiques et même les scientifiques, avaient déjà éprouvé cette stupéfaction inouïe le seize juillet précédent lors du premier essai à Alamagordo. En conséquence, outre les aspects purement destructifs de cette nouvelle arme scientifique, des effets d’un autre ordre étaient « attendus, et même espérés », (d’une manière quasi mystique (5)), et que l’on pourrait formuler de la manière suivante : en sidérant les esprits, il s’agissait de ficher, au creux des inconscients, une munition anti-personnelle à retardement, destinée à faire des trous dans l’ordre symbolique du sujet (le langage) longtemps après l’explosion. Depuis, ces trous dans l’ordre symbolique n’ont fait que croître et sont devenus les niches d’une nouvelle servitude, car un des moyens dont dispose l’idéologie pour devenir inintelligible et invulnérable, c’est justement d’infiltrer le langage, les mots de chaque jour. D’autre part, cette forte stupéfaction des consciences a constitué ce que l’on pourrait appeler l’expérimentation princeps (à cette échelle) de la « stratégie du choc », laquelle, – combinée au dispositif  (6) à 360° – inaugure ainsi l’usage d’un des leviers de la gouvernance propre au totalitarisme démocratique (7). Condition insuffisante, certes, mais nécessaire : c’est dans la critique radicale de cet ordre symbolique embarqué (embedded) et dans celle de l’imaginaire qu’on lui propose à peu de frais, que le sujet a des chances de maintenir une parole vivante, et le monde de survivre.

 

Troisième thèse

Levinas a attiré l’attention sur le fait, pour lui paradoxal, qu’une civilisation, qui avait proclamé la valeur absolue de la personne, ait industriellement massacré ou laissé massacrer six millions d’êtres humains du seul fait qu’ils étaient juifs, tziganes, homosexuels, internés en psychiatrie ou opposants. Il ajoutait que, malheureusement, la culture occidentale n’avait pu l’empêcher. Or, le premier génocide du siècle, déjà perpétré par l’Allemagne, le fut entre 1904 et 1908 en Namibie, contre les Hereros (8) tandis que dès ce moment-là, les pratiques eugénistes à la base du nazisme y fleurissaient (9) comme aux États-Unis et ailleurs (10). Une constatation s’impose : cette civilisation était déjà corrodée de l’intérieur, à un point inimaginable aujourd’hui ; il était donc vain d’en attendre un secours face à la barbarie (11).

N’en déplaise aux antiquaires de l’Histoire et de la Philosophie, il faut considérer ensemble Auschwitz et Hiroshima parce qu’ils sont l’avers et le revers d’une même médaille, et qu’ils ont marqué à jamais la conscience de l’humanité et le devenir de la planète de leurs sceaux indélébiles. Ce n’est pas seulement que la mort industrielle et scientifique y montrait son vrai visage, en 1945 ; il s’est alors ouvert une nouvelle période de l’histoire humaine et de l’Anthropocène dont toutes les dimensions sont encore méconnues ou très largement mésestimées, ce qui fait que l’on parle encore de manière laudative des trente années qui ont suivi la seconde Guerre mondiale comme de « trente glorieuses » années alors que jamais, depuis la nuit des temps, la Terre, le vivant et l’humanité n’avaient été confrontés à d’aussi dures épreuves. Deux exemples : sait-on que, depuis 1945, plus de cinquante millions de personnes sont mortes des suites d’accidents automobiles et qu’autant sont gravement handicapées à vie (12) ? Et qui sait que, depuis cette date les 2 400 explosions atomiques – et tous les autres avatars du nucléaire – auront provoqué plus de soixante-cinq millions de morts ? C’est-à-dire que ces deux non-évènements auront fait deux fois plus de victimes que la seconde Guerre mondiale (13) tout en restant insu.

 

Quatrième thèse

Au-delà de leurs spécificités, Auschwitz et Hiroshima ont plusieurs traits en commun dont l’un d’entre eux est capital : ce sont des crimes commis contre l’Humanité (14). De ce fait, la génération d’après-guerre a eu en cadeau dans son berceau les signifiants des plus radicales expériences de déshumanisation que le monde ait jamais connues. L'effet de ces désastres n’est toujours pas apuré dans les consciences (et la civilisation) occidentales, ce qui contribue à mettre entre parenthèses tout sens moral et à refouler ce qui en fait l’inhumanité radicale. La transmission entre générations en est profondément affectée : sur quel crédit moral la parole des ascendants peut-elle encore s’appuyer ? L’avènement de l’image télévisuelle, (qui a préparé celle de l’informatique généralisée), est venu approfondir cette césure par la prévalence d’une procédure de connaissance qui se voudrait immédiate (dans les deux sens du terme), c’est-à-dire sans aucun intermédiaire et « en temps réel ». C’est ainsi que la parole des anciens et notre langue maternelle sont progressivement mises hors-jeu. Or, cette transmission entre générations, c’est l’apprentissage de la butée, de la limite ; quand il fait défaut, il se fait par le passage à l’acte avec tous les effets délétères et mortifères que cela entraîne. Cet état des choses (visible aussi bien au plan individuel et collectif que politique) est porteur des plus gros dangers pour notre monde en tant que nous avons acquis les possibilités technoscientifiques de tout détruire d’une manière systémique, que ce soit violemment, très lentement, ou même en faisant passer cet anéantissement minutieux pour un projet salvateur (Cf. les projets de géo-ingénierie nanotechnologique comme recours contre les effets des surcroîts de gaz à effet de serre).

 

Cinquième thèse

Tout ce qui précède (y compris les profonds traumas de guerres) constitue le terreau d’une évolution sociale et psychique inédite qui a été favorisée et s’incarne à merveille dans « l’American Way of life » : la jouissance de l’objet (15) et la tyrannie de l’immédiat fondent une double « forclusion du sujet » (16). Les dispositions psychiques elles-mêmes, qui permettaient de penser, de sublimer, ont progressivement été dévaluées : ce qui est de l’ordre de la Culture, de la création, de la réflexion critique, est partout mis au ban, sans avoir même besoin de le formuler, encore moins de le planifier ; l’efficacité immédiate, le taux de retour sur investissement ou l’image de marque sont devenus les critères d’un utilitarisme universellement admis et promu. Cela a engendré, avec le leurre généralisé d’un prétendu individualisme (17) (en fait un conformisme totalement et vulgairement formaté), une irrésistible « mèreversion » (18) de la démocratie dont la figure s’est progressivement tournée vers une sorte de totalitarisme démocratique. La mise en place de cet État politique doit beaucoup au coup de maître initial (encore très largement sous-estimé, car peu étudié, et dont les archives sont encore pour partie inaccessibles), qu’a représenté le Manhattan Project durant les années de guerre.

 

Sixième thèse (première forme du déni)

J’appelle « secrets de la famille occidentale » tout ce qui a conduit à Auschwitz et à Hiroshima. Ceux-ci, d'indicibles après-guerre, sont devenus innommables à la seconde génération et deviennent inimaginables pour la troisième, celle d’aujourd’hui. Cela a également entraîné des ruptures de mémoire qui compliquent la nécessaire conscience du « peu d’avenir que contient le temps où nous sommes » (19). En plus de la difficulté accrue qui s’ensuit pour affronter l’immensité de ces crimes voilés contre l’humanité, cela entraîne évidemment leur refoulement. Il en résulte que la mort à grande échelle véhiculée par l’énergie atomique (et cette civilisation industrielle) a été prise dans la banquise de profonds dénis, ce qui a fortement contribué à anesthésier la conscience de cette CHOSE et de ses dangers à tous les niveaux de la société : civile, technicienne, scientifique, philosophique et politique. La privatisation « des exploitants » en cours depuis trente ans, avec son cortège de démotivations et de suicides reconnus après-coup, d’externalisations et de départs massifs à la retraite, occasionnent d’autres types de ruptures de mémoire propre aux macro-systèmes sociotechniques à interactions complexes et couplages forts (20) qui sont totalement inédits par leur extension et leur diversité. D’autres facteurs historiques, sociaux, organisationnels et techniques, notamment le vieillissement des installations jusqu'à soixante ans, comme le souhaite EDF, augmentent la probabilité d’une occurrence de catastrophe nucléaire majeure dans ce pays, jusqu’à la rendre inéluctable.

 

Septième thèse (la mémoire et le déni)

La France entretient de drôles de liens avec sa mémoire historique, et pour cause. Comme il y eut une drôle de guerre de septembre 1939 à mai 1940, une profonde défaite de juin 1940 à juin 1944, une curieuse collaboration durant ces quatre années, une troublante libération importée d’outre-Atlantique et initialement prévue en occupation militaire (21), il s’est mis en place une étrange victoire d’août 1944 à octobre 1945. Que l’historiographie française ait eu besoin d’être ébranlée, trente ans après, par un chercheur étranger, Robert Paxton, pour ouvrir les yeux sur ce douloureux passé, n’est pas sans signification pour ce qui nous préoccupe. Car dans ce pays, plus que partout ailleurs, le nucléaire s’est établi sur le profond déni d’une réalité historique plus que désagréable à affronter, sans parler de la réitération de ces amères défaites, quelques années plus tard, en Indochine et en Algérie.

C’est ce déni de tout un pan du passé (de 1940 à 1962, presque le temps d’une génération), largement partagé dans la société française, qui coule encore, souterrainement, dans tout l’imaginaire de la classe politique à travers le fantasme de « glorieuses années ». C’est ce qui explique aussi le statut intouchable et enkysté du nucléaire dont ils espéraient une rédemption et qui en conserve une part de sacré à leurs yeux, sacralité illustrée par la locution suivante : « l’indépendance-énergétique-et-militaire-de-la-Nation » (22). Érigé en principe intangible qui infuse dans la haute administration, dans les grands corps et parmi les technocrates, ce profond déni est caractéristique de l’imaginaire des politiques français : ils veulent encore tous croire dur comme fer que le nucléaire français est exceptionnellement sûr et qu’il n’y a donc pas lieu d’affoler la population, ni même de s’en préoccuper.

Cela constitue évidemment une des meilleures manières de préparer l’avènement d’un accident majeur car ce fut exactement l’état d’esprit du « village nucléaire » japonais (politiques, administrateurs, régulateurs, industriels et exploitants confondus (23)) à la veille de Fukushima – un état caractérisé par une incompétence à peine croyable, la dissimulation, les malversations, une impréparation maximale – et ce sera exactement la même chose en France.

 

Huitième thèse

C’est dans les semaines suivant Nagasaki, avant même la création de la « joint commission (24)» puis de l’Atomic Bomb Casualty Commission (25), que se sont mis en place les termes d’un débat sur les contaminations aux faibles doses qui n’en finit pas depuis plus de soixante ans, alors que c’est une question de santé publique de première importance. Étudier ce qui s’est vraiment passé juste après le désastre, au Japon, en 1945, reste d’une brûlante actualité : autant que l’on sache, des pans entiers de cette réalité sont encore sous le sceau du secret. J'emploie l’expression autant que l’on sache, car, au fur et à mesure que l’on se penche sur l’histoire de cette industrie nucléaire civile et militaire, on prend conscience qu’elle est marquée du double sceau du secret et de la mort. Cette question mériterait également d’être examinée d’un point de vue épistémologique : au village nucléaire international qui dénie ces effets en les nommant « stochastiques », c'est-à-dire non déterministes, il faudrait renvoyer l’indéterminisme fondamental qui caractérise tout ce qui concerne les phénomènes engendrés par le bombardement neutronique non contrôlé d’un noyau d’uranium ou de plutonium.

 

Neuvième thèse

Les dimensions exceptionnelles du « Manhattan Project » n’ont pas été suffisamment étudiées ou prises en compte pour de multiples raisons et dans de multiples domaines. Or ce projet inaugure ce « dispositif à 360° » caractéristique d’une dérive des États, synchrone de l’impériale « American Way of life » qui fut non négociable depuis ses débuts. Sur le mode d’une rationalité calculatrice sans vérité, avec la science pour puissant référent universel, le totalitarisme démocratique qui s’est progressivement mis en place n’a pas pris pour modèle celui des années 30 en Europe. Le « plus jamais ça » est donc totalement inadéquat pour décrypter cette mutation économique et politique du lien social. L’encerclement idéologique des individus qui s’en est suivi a pour pendant la misérable « circularité des raisons de vivre » que la production industrielle de masse a imposé avec la consommation de ses produits par ses propres producteurs.

 

Dixième thèse

Ce que contient la piscine N°4 de Fukushima, ce ne sont pas seulement trois cents tonnes d'assemblages neufs et irradiés, c’est l’équivalent de trois « cœurs » de réacteurs (50 % de plus qu’à Tchernobyl). Elle contient le danger, suspendu à trente mètres de hauteur, de rayer de la carte une grande partie du Japon, avec des conséquences mondiales imprévisibles (26). Qu’en disent les autorités, le village nucléaire international et les médias, en particulier en France ? Les uns sont dans leur déni constitutif, quant aux autres, il faut avoir entendu, au moins une fois dans sa vie, ce type de conférence de presse pour en croire ses oreilles (27) … Au temps de l’Anthropocène, la notion de catastrophe sous-entend la dévastation totale de l’écosphère comme horizon, même si les spécificités, les spatialités et les temporalités des diverses catastrophes ne sont pas prévisibles. Depuis les années 40, le monde est devenu un laboratoire d’essais de la toute-puissance à l’échelle1:1. Les animaux sont devenus des produits industriels dès 1865 à Chicago ; les êtres humains, eux, de la chair à canon, des cobayes (28), des ressources, puis des variables d’ajustement selon les besoins ; quant au vivant, aujourd'hui brevetable, il est en passe d’être entièrement aux mains de trusts transnationaux.

 

Onzième thèse

Tout comme il y eut des Faurisson, il y a des négationnistes de l’Anthropocène. Il est de la toute première importance de comprendre que la toute puissance – au besoin armée – fut et reste le cadre dans lequel ils ont vécu, dans lequel ils demeurent, et qui a façonné leur être intérieur : ils s’y accrocheront jusqu’à la dernière minute. En ce sens, avec Auschwitz, le nucléaire, « fils-aîné-de-la-science » reste une clé de voûte capitale de l’imaginaire occidental qui mène le monde à sa perte. La toute-puissance nucléaire représente le saut de la mort où certains veulent entraîner l’Humanité et l’écosphère. La déconstruction de cet imaginaire, pièce à pièce, est une condition nécessaire, bien qu’insuffisante, pour préserver notre humanité au quotidien et aussi celle de nos descendants.

 

Douzième thèse

Tout comme le néolibéralisme financier n’a plus besoin de parler politique pour faire la politique du monde, mieux, pour mettre à genoux des dirigeants politiques partout asservis à leurs soifs de liquidités, le nucléaire, qui, partout, a été promu par des complexes scientifico-militaro-industriels et a été imposé par des minorités, se présente comme l’assurance d’un confort à bon marché incontournable, encouragé en cela par la consommation de masse et une politique de croissance illusoire. Encouragé aussi par l’absence d’études exhaustives contradictoires en la matière, il se paye le luxe de se présenter sur le papier glacé des médias comme une énergie propre et économique. Et même après la catastrophe de Fukushima, s’il advenait que des aménagements de sécurité en viennent à lui être imposés, le village nucléaire international a d’ores et déjà préparé sa réponse : il exige d’ores et déjà en contrepartie de pouvoir prolonger l’exploitation des installations le plus longtemps possible (29), c'est-à-dire jusqu’à la dernière minute.

 

Treizième thèse. Le nucléaire, essence du politique « postmoderne ».

Avec la domination sans partage du mode de connaissance scientifique, tous les verrous qui rendaient le réel incontournable et avivaient ainsi le DESIR ont sauté. Le réel a alors acquis un autre statut : de fondamentalement inatteignable, il est prétendument devenu à la portée de l’homme demain matin. Cela peut s’énoncer autrement : les sciences peuvent nous dire tout le vrai, plus rien ne peut échapper, la transparence est possible et toute entrave à la jouissance immédiate trouvera sa solution finale (c’est ainsi que doivent se penser les projets de géo-ingénierie). Ce paradigme de la toute-puissance est au cœur de l’invention et de l’utilisation de l’énergie atomique. C’est, – avec ses dangers incommensurables – ce qui fait du nucléaire l’essence philosophique incontournable du politique postmoderne. En ce sens, la toute-puissance constitutive du nucléaire participe bien plus que d’une idéologie ou d’un récit de fondation. Elle s’appuie et relève d’une nouvelle conception de l’humanité, post-prométhéenne, et son anthropologie reste à faire.

 

Quatorzième thèse.

La synergie avec le néolibéralisme financiarisé est devenue envahissante, très préoccupante même, car la consigne sociale de celui-ci est de faire sauter toutes les bornes, de gommer la notion même de limite, pour pouvoir miser sur une croissance et une expansion sans fins, avec pour horizon une catastrophe planétaire à laquelle les uns et les autres préparent subrepticement les populations (30). Au niveau individuel, il est devenu hautement recommandé de faire appel à la technoscience pour éviter d’avoir à se confronter au réel et à éprouver la perte, la solitude, la finitude, notre mortalité – autrement dit la condition humaine qui nous amènerait à prendre conscience et à réagir.

 

Quinzième thèse. Appels à la surrection des consciences.

La critique, pour identifier les éléments négatifs d’un ordre social et politique, a besoin d’un horizon de sens, et le seul qui vaille, en ces domaines, c’est celui de l’émancipation. Or, de ce côté-là, le ciel s’était bien obscurci, et pour de multiples raisons, depuis quelque temps. Ce qui fait que, souvent, l’analyse n’a plus de points d’appui, plus de repères, évite même soigneusement de développer toute problématique : « on se réfère à un ensemble de connaissances très élaborées mais qui deviennent sans conséquences, dont il ne sera rien tiré. C’est par exemple ce que l’on rencontre fréquemment dans certains discours académiques : une accumulation de connaissances très développées, très intéressantes, un déploiement de savoirs rigoureux et argumentés qui, pourtant, peuvent très bien ne jamais devoir engager leur auteur et se révèlent dès lors sans aucun effet (31) ». C’est le prix, depuis trente ans, des défaites, des reniements, de l’envahissement néolibéral et d’une forme de servage inédite dans l’histoire de l’humanité. Faute de cet horizon d’émancipation, le devenir catastrophique du monde et du vivant – qu’il ait pour origine des activités industrielles, nucléaires ou financières – est venu en prendre la place dans la critique. Et après tout, ce pourrait être un retour salutaire à la matérialité, à la réalité… de ce que nous vivons.

 

1) Le temps est venu de lancer des groupes de recherche, des conférences ou des séminaires autonomes, bref toute forme d'élaboration intellectuelle indépendante, sans laquelle aucun changement de cap ne pourra se faire. Sans oublier que les réseaux informatiques ne pourront jamais rivaliser avec l’action coordonnée des hommes, le devenir de tous les « printemps arabes » est une malheureuse illustration de cette autre nécessité : celle de « penser le monde » avant que d’autres le fassent à notre place et s’emparent de l’espace de démocratie ainsi créé. Les militaires, les économistes, les politiques libéraux, avaient très tôt compris (dès 1947 avec la société du Mont Pèlerin) qu’il ne pouvait y avoir d’issue politique en leur faveur sans avoir au préalable gagné la bataille des idées : ils ont financé les radios, les télévisions, les universités, les « think-tank » par milliers pour défaire l’ex-URSS puis les mouvements contestataires des années 60 et ont préparé patiemment l’avènement néolibéral. Hors cette lutte déterminée sur le terrain des idées, il n’y a pas d’autre possibilité de les empêcher de mener le monde et notre humanité à leur perte. Le nombre de décennies qu’il nous reste pour les arrêter se compte vraisemblablement sur les doigts d’une main … Pour le moment, ce que nous avons tous à y gagner, c’est qu’il n’y a pas non plus d’autre manière de rester humain, jour après jour.

 

2) En 2011, pour le vingt-cinquième « anniversaire de Tchernobyl » et suite à la catastrophe de Fukushima, un appel (32) intitulé « Hiroshima, Tchernobyl, Fukushima : des crimes contre l’Humanité » fut publié. Cet appel à la conscience morale et politique, signé par un certain nombre de philosophes et de personnalités – Paul Ariès, Marc Atteia, Marie-Christine Gamberini, Raphaël Granvaud, Alain Gras, François Jarrige, Eva Joly, Baudouin Jurdant, Paul Lannoye, Serge Latouche, Frederick Lemarchand, Corinne Lepage, Stéphane Lhomme, Jean-Marie Matagne, Jean-Marie Pelt, Pierre Rabhi, Jacques Testart, Alexeï Yablokov – traduit en six langues (dont le japonais et le chinois) fit le tour du monde sur Internet. Fallait-il le transformer en pétition internationale ou le laisser subsister ainsi, fragile, à la surface de la mémoire, comme l’émotion qui suit l’écoute d’une œuvre musicale, surtout quand l’artiste indique au public que le silence qui suit fait partie de l’interprétation qu’il vient de lui donner ? En tous cas, nous avons eu la satisfaction de constater (y compris aux Etats-Unis) qu’il n’est pas rare maintenant de voir CES CRIMES appelés par leurs noms. Cet appel est une illustration des possibilités immenses de chacun d’entre nous, pour peu que nous en sentions la nécessité en tant qu’être humain.

 

3) Une des marques essentielles d'une œuvre artistique, c’est qu’elle bouleverse notre être. Et, lorsqu'une chape de plomb pèse sur les mémoires et les consciences, une œuvre d’art peut contribuer de manière décisive à dessiller nos regards, car elle a ce pouvoir incomparable de nous rendre envisageable (et même représentable) ce qui est socialement refoulé et qui fait défaut dans l’élaboration intellectuelle. En France, des films comme Les sentiers de la gloire de Stanley Kubrick, Le chagrin et la pitié de Marcel Ophüls, et Shoah de Claude Lanzmann, quelques réserves que l'on y fasse, furent des événements multidimensionnels aussi bien par leur propos que leur ampleur de vues. De même, les œuvres de Primo Levi, Robert Antelme, David Rousset, Charlotte Delbo, Elie Wiesel, Jorge Semprun, Jean Améry, furent d'une importance décisive lorsque dans l’après-guerre, il fallut rendre la voix à ces rescapés des camps de la mort alors que l’on s’échinait à en étouffer la parole une seconde fois. Autrement dit, lorsque le silence ou le refoulement sont de mise, les artistes ont un rôle de dévoilement irremplaçable (33). Or il s’est passé quelque chose de fondamental à Hiroshima sur le plan de la tragédie, du pathétique, du politique, de la vie elle-même. Souvenons-nous que les cinquante-cinq réacteurs japonais ont avant tout été construits sur les failles de cette mémoire. Il y aura d’autres Fukushima, ici même, car du point de vue de la mémoire, nous avons des béances au moins aussi imposantes que celles du peuple japonais, et le déni en plus (le parallèle entre les deux pays est d’ailleurs fort instructif). C’est pourquoi nous attendons avec impatience des Canto Général écrits par des Patrick Chamoiseau, Édouard Glissant, Viviane Forrester, André Velter, Armand Gatti, Beaudoin de Bodinat et orchestrés par un Mikis Theodorakis. C’est un Sophocle, un Euripide ou un Eschyle que nous espérons, pour mettre en scène la tragédie, unique, que l’humanité et le monde sont en train de vivre.

Jean-Marc Royer décembre 2012/janvier 2013.

 

Je tiens à remercier Christophe Bonneuil pour ses encouragements et Alain Gras, Quentin Hardy, Serge Latouche et Sandrine Marchal pour leur relecture de cet article.

 

 

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1 Gérard Rabinovitch, Inquiète ton voisin comme toi-même. Notes critiques sur Modernité et Holocauste de Zygmunt Baumann, Travailler, 2003/2 n° 10, p. 163-184. DOI : 10.3917/trav.010.0163, http://www.cairn.info/revue-travailler-2003-2-page-163.htm

 

2 Et sur celles de Michel Henry, Jean-Claude Michéa, Majid Rahnema, Cornélius Castoriadis, Jean-Pierre Lebrun.

 

3 Roger Belbéoch a lu la presse internationale. Il fait part de ce travail dans une interview (en bas de page) sur http://www.dissident-media.org/infonucleaire/brevet_bombea.html. Tout cela revenait aussi à présenter cette explosion comme l’implacable illustration du fait que, dorénavant, nul ne pourrait plus jamais arrêter la marche du Progrès car sa puissance dépassait maintenant, et de loin, toute volonté humaine.

 

4 16 juillet, 6 et 9 août 1945.

 

5 Les premiers mots d’Oppenheimer furent ceux de la Bhagavad-Gîtâ : « Maintenant, je suis devenu la mort, le destructeur des mondes ».

 

6 Dispositif : « tout ce qui a, d'une manière ou d'une autre, la capacité de capturer, d'orienter, de déterminer, d'intercepter, de modeler, de contrôler, et d'assurer les gestes, les conduites, les opinions et les discours des êtres vivants », Giorgio Agamben, Qu'est-ce qu'un dispositif ? Rivages, 2007.

 

7 Il s’agit là, pour le dire vite, de l’utilisation des moyens démocratiques contre la démocratie, ce qui tend à devenir systématique en Occident. Une autre forme en est la dénégation des votes populaires rejetant les différents traités européens ou, les « ajustements » législatifs et constitutionnels des pouvoirs exécutifs afin de se soustraire aux poursuites judiciaires encourues à la suite d’agissements délictueux ou criminels ou pire encore et plus récemment, la nomination de quatre financiers ayant transité par la même banque, Goldmann Sachs, à la tête de responsabilités gouvernementales européennes en dehors de tout processus démocratique.

 

8 Ingolf Diener, Namibie, une histoire, un devenir, Éditions Karthala, Paris, 2000, http://www.lautresite.com/new/edition/explo/hereros/ et http://pressafrique.com/m102.html. De même, au Congo, entre 1890 et 1907, durant le règne du roi Léopold II de Belgique des massacres de masse avec ordre d'extermination des villageois ont été constatés, tout comme dans l’Oubangui-Chari. Sources : Arthur Conan Doyle, Le crime du Congo belge, Nuits rouges, 2005. Adam Hochschild, Les fantômes du roi Léopold ; la terreur coloniale dans l’État du Congo, Tallandier, 2007. Jules Marchal, E.D. Morel contre Léopold II ; l'histoire du Congo, 1900-1910, t. 1 et 2, Harmattan, 2003, 2010. Joseph Conrad, Au cœur des ténèbres, Flammarion, 2012. http://www.pressafrique.com/m396.html et Stephen Smith, Géraldine Faes, Bokassa 1er; un empereur français, Calmann-Lévy, 2010.

 

9 En 1915 déjà, un scientifique américain, Vernon M. L. Kellogg est nommé directeur du Comité d’aide aux Belges par le gouvernement des USA. C'est à ce titre qu'il se trouve au Grand Quartier Général allemand en 1917 et qu'il en rapporte un livre peu connu " Headquarters Nights, a record of conversations and experiences at the headquarters of the german army in France and Belgium " dans lequel il rapporte les théories âprement discutées au GQG allemand qu'il a fréquenté au jour le jour. J’en ai traduit quelques extraits dans mon ouvrage, La science creuset de l’inhumanité. Décoloniser l’imaginaire occidental, l’Harmattan, 2012, pp 49 et 152.

 

10 Et jusque dans la législation suédoise des années 1970. Cf. André Pichot, La Société pure. De Darwin à Hitler, Flammarion, coll. « Champs », 2009.

 

11 Cf. mon ouvrage, opus cité, pp 43-65 et 82-85.

 

12 Contribution personnelle au séminaire GATSEG de Dominique Pestre, Sezin Topçu, Soraya Boudia, Amy Dahan. Mai 2012.

 

13 Je renvoie à ce sujet à la publication du Comité Européen sur le risque de l’Irradiation, (CERI) Recommandations 2003 du CERI, Éd Frison Roche, 2004, p 168 ou au rapport en anglais sur : www.euradcom.org ou aux publications de l’académie des sciences de New-York ou bien encore à mon ouvrage Note XV. Activités nucléaires depuis 1965 : plus de soixante-cinq millions de morts, p 178.

 

14 Cf. à ce sujet l’appel international « Hiroshima, Tchernobyl, Fukushima : des crimes contre l’humanité » traduit en plusieurs langues et signé par une vingtaine de philosophes et personnalités publiques.

 

15 La première bombe atomique qui explosa le 16 juillet 1945 avait pour nom de code Gadget.

 

16 Forclusion ou enfermement. Dire que le « sujet », au sens philosophique, est forclos ou « barré », comme aurait dit Lacan, c’est dire qu’il ne peut advenir à lui-même. Autrement dit, les sujets cèdent le pas à leurs ombres, dans une quête sans fin de la jouissance immédiate, ce qui convient à merveille au système marchand qui sous-tend le « totalitarisme démocratique ».

 

17 Cf. à ce sujet l’œuvre de Cornélius Castoriadis.

 

18 Concept emprunté à Jean-Pierre Lebrun dans son maître ouvrage, La condition de l’homme n’est pas sans conditions, Denoël, 2010.

 

19 Beaudoin de Bodinat, La vie sur Terre. Réflexion sur le peu d’avenir que contient le temps où nous sommes, Encyclopédie des nuisances, 2008.

 

20 Extension du concept d’Alain Gras : les Macro systèmes complexes.

 

21 Occupation militaire préparée par les États-unis sous le nom d’AMGOT, Allied Military Government of Occupied Territories.

 

22 « Indépendance » largement appuyée sur un néocolonialisme plus destructeur que l’ancien. Cf. à ce sujet Raphaël Granvaud, Areva en Afrique ; une face cachée du nucléaire français, Agone, 2012.

 

23 Cf. à ce sujet le rapport de la commission indépendante de la Diète japonaise sur Fukushima, The national Diet of Japan. Fukushima Nuclear Accident Independent Investigation Commission (NAIIC), année 2012.

 

24 En septembre et octobre 1945 au moins trois commissions états-uniennes différentes se rendirent au Japon. Cela commençait à tirer à hue et à dia. Mac Arthur exigea donc une réunion de ces entités de manière à mieux les contrôler.

 

25 Atomic Bomb Casualty Commission, fondée en 1946 par les États-Unis dans le Japon occupé pour récupérer le maximum d’éléments, d’enquêtes et de travaux sur les irradiations et les contaminations atomiques afin d’en interdire l’accès ou l’usage ultérieur.

 

26 Cf. l’étude que j’ai coordonnée avec P. Fetet, publiée sur son blog : http://ddata.over-blog.com/4/37/62/00/piscine-4/Piscine-du-R4-V9--2-.pdf

 

27 Pour se faire une idée précise ce cette complicité, il faut absolument regarder la seconde partie de la conférence de presse de l’ASN du 28 juin 2012 sur son site : http://www.asn.fr/index.php/S-informer/Actualites/2012/Rapport-de-l-ASN-2011-il-y-aura-un-avant-et-un-apres-Fukushima.

 

28 Entre 1942 et 1961, diverses « expériences » d’irradiation et d’inoculation radioactives furent pratiquées sur des enfants et des adultes civils et militaires états-uniens dénommés HP, Human Products : JP Desbordes, Les cobayes de l’apocalypse nucléaire, Roularta, 2011, pp 54 à 62.

 

29 Ce qui revient à tenter de reprendre d’une main ce que l’on a accordé de l’autre, sans parler de toutes des stratégies de lobbying destinées à affaiblir le contenu des recommandations applicables, ni des lenteurs bureaucratiques opposables, ni du détournement des règles dans l’application des procédures obligatoires, ni des externalisations galopantes. Cf. à ce sujet le rapport de la commission indépendante de la Diète japonaise sur Fukushima, opus cité.

 

30 Cf. le projet Ethos in bulletin Criirad : http://www.criirad.org/actualites/tchernobylfrancbelarus/conclusionsonu_aieasept05/tu22mensonges.pdf

 ou la vidéo de Michel Fernex : http://www.youtube.com/watch?v=tyiSRxLYAss ou encore : http://www.dissident-media.org/infonucleaire/codirpa.html ou bien encore l’étude des projets Ethos, Core, Sage, Parex in Marc Atteia, Le technoscientisme, le totalitarisme contemporain, Yves Michel, 2009.

 

31 Jean-Pierre Lebrun, La condition humaine n’est pas sans condition, Denoël, 2010, p 23. Voir aussi Un monde sans limite, érès, 2009.

 

32 Publié par les Zindigné(e)s en novembre 2011 et mis en ligne par Pierre Fetet sur le blog dédié à Fukushima : http://fukushima.over-blog.fr/article-appel-international-hiroshima-tchernobyl-fukushima-des-crimes-contre-l-humanite-101458831.html

 

33 L’horreur économique de Viviane Forrester, un essai publié en 1996, diffusé à trois cent cinquante mille exemplaires et probablement lu par un million de Français, traduit en vingt-quatre langues a, de ce point de vue, constitué un événement qui était l’œuvre, comme dans toutes les périodes troubles, d’un artiste, en l’occurrence d’un écrivain-essayiste. D’où cette dernière thèse en forme de triple appel.

 

 

 

 

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26 mars 2013 2 26 /03 /mars /2013 23:59
Plusieurs chaînes humaines ont eu lieu à Paris le 9 mars 2013 autour des lieux de pouvoir pour réaffirmer l’urgence de sortir du nucléaire.
 
Nous étions des milliers à nous tenir la main et à crier "Fukushima plus jamais ça", certainement pas assez, mais suffisamment pour être entendus par les passants et les médias.
 
Pas besoin d'en écrire plus, je poste ce soir uniquement quelques liens, quelques vidéos et quelques photos pour partager les meilleurs souvenirs de cet évènement, et pour témoigner de notre solidarité internationale envers les victimes de toutes les catastrophes nucléaires, de Tchernobyl à Fukushima.
 
Photos à l’Opéra et au Ministère de la Santé
 
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Autres photos
 
Vidéos
 
Chaîne à l’Opéra
     
       
Concert à la Bastille

 
 
Revue de presse
 
Autres vidéos
 
Albums
 
Chaîne Ministère de la santé
(cliquer sur l'image pour accéder à l'album) 
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Chaîne Hotel de Ville - Bastille
 
Chaîne à Paris
 
Votre serviteur interviewé par TF1 (à 0:34)
 

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24 mars 2013 7 24 /03 /mars /2013 18:12

DSCF6154---Copie.JPGA l’invitation d’un collectif d’associations, Jean-Louis Basdevant s’est exprimé lors d’une conférence le 7 mars 2013 à Strasbourg sur le sujet polémique de la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim. Pour cet ancien professeur de l’Ecole polytechnique, c’est clair, il faut stopper Fessenheim immédiatement.

 

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Après la catastrophe de Fukushima, Jean-Louis Basdevant a selon ses propres mots « viré sa cuti ». En juillet 2011, il comprit que toutes les centrales nucléaires françaises pouvaient avoir le même problème qu’au Japon. Selon lui, « l’accident nucléaire grave » n’a été pris en compte en France qu’à partir de la conception de l’EPR, ce qui signifie qu’aucun réacteur en France n’est construit selon les normes de sécurité que l’on exigerait aujourd’hui. En effet, aucun réacteur français ne possède le moyen d’arrêter un corium suite à une fusion du cœur.

 

L’exemple de Fessenheim

 

Dans la centrale alsacienne, le socle en béton constituant ce qu’on appelle le radier a une hauteur de 1,5 mètre. Selon le physicien nucléaire, ce socle ne résisterait pas longtemps à un cœur fondu à 2800°C, et celui-ci atteindrait rapidement le sol géologique. La recommandation de l’ASN qui préconise de renforcer ce radier serait inefficace car l’ajout d’une épaisseur de 50 centimètres de béton ne retarderait l’avancée du corium que de quelques heures. A titre de comparaison, la centrale de Fukushima Daiichi a un radier estimé entre 6 à 8 mètres, et selon Jean-Louis Basdevant, le corium a traversé cette épaisseur en mars 2011 et se trouve actuellement en dehors de l’enceinte de confinement.

 

Un récupérateur de corium

 

La grande nouveauté de l’EPR ‒ dont on a bien du mal à obtenir un prototype et dont le coût a plus que doublé depuis le début des travaux à Flamanville (3,3 à 8,5 milliards d’euros) ‒ est le récupérateur de corium. Aujourd’hui, aucun réacteur en France ne possède ce système. La recommandation de l’ASN pour Fessenheim est d’assortir cette surcouche de béton d’un récupérateur de corium, ce qui nécessite des travaux d’un coût de 30 à 50 millions d’euros pour les deux réacteurs. Mais en cas d’inondation, que se passerait-il si le corium rencontrait brusquement une masse d’eau ? Dans les deux dernières catastrophes nucléaires (Tchernobyl et Fukushima), les spécialistes ont toujours craint une explosion de vapeur qui pourrait endommager gravement l’enceinte de confinement.

 

Présence du grand canal d’Alsace

 

Pourquoi craint-on une inondation à Fessenheim ? Le refroidissement des réacteurs est assuré par l’eau du grand canal d’Alsace qui est situé 9 mètres plus haut que le sol de la centrale. En cas de rupture de la digue (tremblement de terre, chute d’avion, …), la centrale serait rapidement inondée et se retrouverait dans la même situation que celle de Fukushima inondée par le tsunami.

 

Une nappe phréatique menacée

 

Sous la centrale de Fessenheim, la nappe phréatique rhénane affleure à 3 à 5 mètres de profondeur. Cette nappe est l’une des plus importantes réserves en eau souterraine d’Europe, contenant près de 80 milliards de mètres cubes d’eau. Elle assure 80% des besoins en eau potable de la région et plus de 50% des besoins des industries. Selon les prescriptions de l’ASN, un puits a été creusé en 2012 dans cette nappe pour alimenter un système de refroidissement de secours en cas de problème avec le refroidissement avec l’eau du canal. Or pour Jean-Louis Basdevant, cette disposition met la nappe phréatique en plus grand danger : en cas d’accident nucléaire grave, le corium n’a même plus besoin de percer la couche de béton qui est sensée protéger la réserve aquifère, car le puits est déjà fait par la main de l’homme. Si une rupture de confinement a lieu, les radionucléides auront une voie royale pour polluer le sous-sol.

 

« Un poignard dans le cœur de l’Europe »

 

Selon le physicien, c’est absurde d’avoir installé une centrale nucléaire à cet endroit précis. Située en zone sismique, sous la menace d’une inondation par le canal, menaçant de contaminer la nappe phréatique et la vallée du Rhin jusqu’à la mer du Nord, il affirme que c’est criminel de continuer à prendre le risque d’un accident grave contaminant une grande partie de l’Europe.

 

 

 

Qui est Jean-Louis Basdevant ?

 

Ancien élève de l’École normale supérieure, le physicien Jean-Louis Basdevant est directeur de recherche au CNRS. Il a été pendant 35 ans professeur à l’École polytechnique dont il a présidé le département de physique. Il donnait des cours de mécanique quantique, d’énergie nucléaire et d’énergie-environnement.

 

Spécialiste de physique des hautes énergies et d’astrophysique nucléaire, il a travaillé au Lawrence Berkeley National Laboratory, au CEA à Saclay, au Cern à Genève, dans des laboratoires américains et à l’INFN de Turin.

 

(source)

 

 

 

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En savoir plus

 

 

Jean-Louis Basdevant : « Pourquoi il faut stopper Fessenheim »(L’Alsace)

Arrêter Fessenheim, une décision vertueuse(Respublica)

Devrait-on arrêter Fessenheim ? (Partager pour comprendre)

Faut-il fermer Fessenheim ? (Newsring)

Maîtriser le nucléaire… ou fermer toutes les centrales nucléaires du monde (Blog de Fukushima)

Dossier Fessenheim (Sortir du Nucléaire)

 

 

 

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Action en justice

 

 

 

Les associations Réseau "Sortir du nucléaire", Alsace Nature, Stop Transports - Halte au nucléaire, Stop Fessenheim et le Comité pour la Sauvegarde de Fessenheim et de la plaine du Rhin ont déposé un recours gracieux contre l’avis de l’ASN sur la poursuite d’exploitation, au-delà de trente ans, du réacteur 1 et contre l’accord pour le renforcement du radier, le 15 février 2013. Ce recours étant resté sans suite, les associations ont déposé un référé et un recours sur le fond devant le Conseil d’Etat, le 21 mars 2013.

 

Lire le communiqué de presse commun

 

En savoir plus sur cette action en justice

 

 

 

 

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La conférence de J.-L. Basdevant en vidéo

 

 

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21 mars 2013 4 21 /03 /mars /2013 23:57

janick-magne-et-eva-joly-1024x576Janick Magne, professeure d’université à Tokyo, est une citoyenne française expatriée au Japon depuis 35 ans. Depuis mars 2011 et les tragiques évènements qui se sont déroulés à Fukushima, elle décide de militer pour une sortie du nucléaire au Japon. L’ex-candidate d’Europe Ecologie Les Verts (EELV) aux législatives pour l’Asie, l’Océanie et le Japon se rend plusieurs fois dans la préfecture de Fukushima pour parler aux habitants et rencontrer les mères mobilisées pour l’évacuation des territoires contaminés. Soutenant activement la population évacuée, elle visite également plusieurs fois la zone interdite de Futuba et en rapporte des photos afin de réaliser une exposition.

Dans les semaines qui viennent, elle va parcourir la France pour témoigner de ce qui se passe au Japon depuis deux ans, en présentant sa conférence dans 5 lieux dont le dernier, Bonnet, se situe à quelques kilomètres de Bure, commune qui accueille le projet monstrueux du centre d’enfouissement de déchets nucléaires que veut imposer le village nucléaire.

 

 

Conférence « Fukushima, 2 ans après »

 

- GOLBEY (Vosges, près d’Epinal) > Vendredi 22 mars 2013, salle Barbelouze (place de la mairie) à 20h30

 

- CONDES (Haute-Marne, près de Chaumont) > Samedi 23 mars 2013, salle des fêtes (proche de la mairie) à 20h00

 

- SAINT-ETIENNE (Loire) > Mercredi 3 avril 2013

 

- CHAMBERY (Savoie) > Jeudi 4 avril 2013

 

- BONNET (Meuse, près de Bure) > Samedi 6 avril 2013

 

 

 

 « C'est mon troisième voyage dans la zone interdite de Fukushima. On ne revient pas indemne de Fukushima. Mon objectif est clair et mes amis japonais y souscrivent entièrement : témoigner, dire l'horreur d'une catastrophe nucléaire, raconter comment du jour au lendemain tous ces gens ont perdu leurs biens, leur maison, leur travail, leurs rêves, leur vie. » (source)

 

 

.

Lors de sa conférence, Janick Magne aborde la situation actuelle de la centrale de Fukushima Daiichi, mais aussi les conséquences sanitaires au Japon et les risques sur le long terme pour l’environnement. Alors que la centrale vient de subir à nouveau un black-out général empêchant le refroidissement des piscines de combustible, beaucoup de questions se posent encore autour de cette catastrophe qui dure, c’est pourquoi la conférencière laisse une large place à un échange avec le public.

 

 

janick-magne 0256 FUTABA cousine de MS 16 02 2013[1]

 

 

 

Expo photos de la zone interdite (50 clichés)

 

PARIS, Mairie du 2ème arrondissement – du 25 au 31 mars 2013

En savoir plus

 

EXPO PHOTOS

 

"Dans la zone interdite de Fukushima"

 

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50 photos de Janick MAGNE & Minami SHIMURA 

 

« A l'invitation d'une famille japonaise amie originaire de la ville de Futaba, en zone interdite, j'ai pu me rendre à trois reprises sur les lieux, entre février 2012 et février 2013. J'en ai rapporté des photos qui montrent le drame humain en train de se jouer là-bas.

Suite à l'accident nucléaire de mars 2011, 70 000 personnes ont évacué en catastrophe en laissant tout derrière elles... Depuis deux ans, les communes de la zone sont restées en l'état. Décombres, tas de ferraille, magasins éventrés, toits écroulés sur la chaussée, champs et rizières envahis d'herbes folles, animaux morts, d'autres qui rôdent en liberté, lourdement contaminés... Pourtant, certains quartiers ont été totalement épargnés et de belles propriétés intactes témoignent encore de la richesse passée de cette région dont la production agricole  et la pêche faisaient la réputation. C'est  l'une des plus belles régions du Japon, avec ses forêts, le Pacifique au pied des collines et les montagnes à l'horizon... Aujourd'hui, ce ne sont plus que villes fantômes envahies par les rats et le silence, où la vie s'est arrêtée subitement... Il  n'est pas facile de pénétrer dans la zone interdite, strictement contrôlée. Il faut en faire la demande à l'avance et justifier de raisons valables. La visite est limitée à 5 heures maximum et l'itinéraire doit être déclaré. Il faut, pour entrer dans la zone, enfiler des tenues blanches en non-tissé et un  masque léger mais ils ne protègent pas des radiations, ils évitent simplement de rapporter sur soi de la poussière contenant des radionucléides ou d'en respirer... »    

Janick Magne                                                      

 

Zone interdite ville déserteet toit écroulé 20026-IMG

 

 

___________________

 

En savoir plus sur Janick Magne :

 

Interview de Janick Magne par Kibo Promesse

 

No futur, zone morte

 

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